Par où commencer ?
Nous avons fait le tour de nombreux outils pour accéder au plus profond de l’être émotionnel et en restaurer la cohérence. Alors, concrètement, par où commencer? L’expérience accumulée au Centre de médecine complémentaire à Pittsburgh nous a permis de mettre au point des règles assez simples pour choisir une combinaison appropriée à chaque personne. Les principes en sont les suivants.
La première chose à faire est d’apprendre à contrôler son être intérieur. Chacun développe au cours de sa vie des méthodes d’autoconsolation pour gérer les passages difficiles. Malheureusement, il s’agit le plus souvent de la cigarette, du chocolat, de la crème glacée, de la bière ou du whisky, voire de l’anesthésie de la télévision. Ce sont, de loin, les manières les plus courantes de se consoler des aléas de la vie. Si nous avons été en contact avec la médecine conventionnelle, ces toxines de tous les jours ont facilement pu être surclassées par un tranquillisant (comme le Valium, l’Ativan ou le Xanax), ou par un antidépresseur… Si, au lieu d’un médecin, c’est un groupe de lycéens, d’étudiants ou d’amis un peu perdus qui nous donne des conseils, les tranquillisants eux-mêmes auront généralement été remplacés par des méthodes d’autoconsolation plus drastiques encore comme le cannabis, la cocaïne ou l’héroïne.
Il est évidemment essentiel de substituer à ces méthodes peu efficaces – et le plus souvent toxiques – des techniques qui utilisent les capacités d’autoguérison du cerveau émotionnel et qui permettent de rétablir l’harmonie entre la cognition, les émotions et un sentiment de confiance dans l’existence. À Pittsburgh, nous encouragions chacun à découvrir sa capacité de cohérence cardiaque et à apprendre à entrer dans cet état de cohérence au moindre stress (ou lorsque la tentation apparaissait de se reposer sur une méthode moins saine – et moins efficace – pour gérer la tension du moment).
Ensuite, il faut identifier, si possible, des événements douloureux du passé qui continuent d’évoquer des émotions difficiles dans le présent. Le plus souvent, les patients sont les premiers à sous-estimer l’importance des abcès émotionnels qu’ils portent encore en eux et qui conditionnent leur approche de la vie, ravivant à chaque instant 1a douleur ou limitant le plaisir. La plupart des praticiens traditionnels ont tendance à ne pas y prêter attention ou bien ne savent pas comment aider 1es patients à s’en libérer. Or il suffit généralement de quelques séances d’EMDR [ http://iis13.domicile.fr/essentiaco/EMDR%20votre-sante%20-1203.htm ] pour nettoyer les conséquences de ce lourd passé et donner ainsi naissance à une perspective nouvelle et plus harmonieuse sur la vie.
Il faut toujours faire l’inventaire des conflits chroniques dans les relations affectives les plus importantes : autant dans la vie personnelle – parents, enfants, époux, frères et sœurs – qu’au travail – patron, collègues, employés. Ces relations conditionnent notre écosystème émotionnel. Assainies, elles nous permettent de recouvrer notre équilibre intérieur. Si elles polluent continuellement le flux de notre cerveau émotionnel, elles finissent par bloquer ses mécanismes d’autoguérison. Parfois, le simple fait de résoudre les conséquences des traumatismes du passé permet aux relations affectives de prendre un nouvel élan. Libéré de spectres qui n’ont rien à faire dans le présent, chacun peut alors inventer une manière entièrement nouvelle d’entrer en relation avec les autres. Apprendre à contrôler sa cohérence cardiaque permet aussi de mieux gérer ses relations affectives. La communication émotionnelle non violente est aussi une méthode directe et remarquablement efficace pour harmoniser les relations affectives et retrouver l’équilibre de soi. Nous devrions tous continuellement nous entraîner à une meilleure communication émotionnelle. Si la formation à ces méthodes par un thérapeute averti ne suffit pas, il faut s’engager dans le processus plus complexe de la thérapie de couple ou de la thérapie familiale (lorsque les conflits les plus importants appartiennent au domaine de la vie personnelle).
Presque tout le monde bénéficiera d’une modification de son alimentation permettant de retrouver un équilibre adéquat entre les acides gras oméga-3 et les acides gras oméga-6, et fournissant ainsi au corps et au cerveau la matière première idéale pour se reconstituer. Nous savons aujourd’hui que ce régime dit « crétois » permet non seulement de combattre le stress et la dépression, mais aussi d’augmenter la variabilité cardiaque. Chacun devrait donc, au minimum, envisager de rééquilibrer son régime de tous les jours en faveur du poisson – voire de prendre des oméga-3 en suppléments alimentaires – et de diminuer l’apport des oméga-6 dans son alimentation.
Initier un programme d’exercice physique est aussi une option ouverte à chacun et qui ne nécessite presque aucun investissement si ce n’est les vingt minutes nécessaires trois fois par semaine. De même, nous devrions tous nous demander si nous pourrions sans trop d’effort changer notre manière de nous réveiller le matin. Puisqu’il suffit, pour commencer à re-régler son horloge biologique, de remplacer son réveil par une lampe programmée pour simuler l’apparition de l’aube, l’effort est minimum et les bienfaits potentiels importants. L’acupuncture, par contre, représente un investissement en temps et en argent bien plus conséquent. Je la recommande surtout à ceux qui souffrent de problèmes physiques – principalement de douleur – en plus de leur souffrance émotionnelle. Dans cette situation, les aiguilles chinoises permettent habituellement de traiter les deux problèmes en même temps (et il est difficile de soulager la dépression de quelqu’un qui souffre continuellement dans son corps… ).
Et finalement, pour atteindre la véritable paix intérieure, il est souvent essentiel pour nous de trouver un sens plus profond au rôle que nous jouons dans notre communauté, au-delà de notre famille immédiate. Ceux qui ont la chance de découvrir une telle source de sens sont en général propulsés plus loin qu’un simple retour au bien-être : ils ont le sentiment de puiser leur énergie dans ce qui donne un sens à la vie elle-même…
David Servan-Schreiber