S’éveiller à une sexualité sacrée
Posté par othoharmonie le 25 avril 2013
Nous pouvons nous libérer de la morale et des normes pour inventer, ou réinventer, une autre sexualité. Une sexualité qui remet le corps en son centre, qui le libère, pour lui rendre toute son intelligence, sensorielle et relationnelle. « C’est là l’enjeu de ce que j’appelle l’amour sexuel, c’est-à-dire une sexualité reliée à une dimension spirituelle, et qui permet d’accéder par le corps à la chair, ce lieu des affects, des émotions, de l’intimité, poursuit Jean-Michel Hirt. Cela implique la capacité d’aller vers l’inconnu de soi et de l’autre, d’accepter d’être ému, troublé. La rencontre sexuelle peut alors être de l’ordre d’un éblouissement, convoquant les sens et l’esprit. »
La spiritualité n’est pas chose abstraite. Le sexothérapeute Alain Héril, auteur des Continents féminins, voyage au cœur du plaisir des femmes (Jean-Claude Gawsewitch, 2008), évoque la proximité entre les mots « sacrum » (os du bas de la colonne vertébrale) et « sacré ». Dans la sexualité hindouiste, la kundalini, « l’énergie sexuelle », est décrite comme un « serpent de feu » lové au niveau du sacrum et qui, se dépliant lors de la relation sexuelle, fait circuler l’énergie vitale dans tout le corps, reliant ainsi l’homme et le cosmos. « La dimension spirituelle de la sexualité ne peut être atteinte qu’en partant du corps, insiste Alain Héril. Il s’agit donc de le mettre au centre, de manière consciente et aimante. » Accéder à une dimension de soi plus grande que soi ne peut se faire que si l’on consent à prendre le risque de la relation intime. La sexualité spirituelle serait donc essentiellement une qualité de présence aimante à soi et à l’autre. S’il n’existe évidemment aucun mode d’emploi, aucune cartographie prédéfinie, six pistes peuvent toutefois nous rapprocher de cette dimension sacrée.
Considérer la spiritualité comme une quête personnelle
Pendant des années, Arouna Lipschitz, philosophe et thérapeute (lire ci-dessous), a pratiqué le tantrisme pour concilier sexualité et spiritualité, avant de se rendre compte que, dans le tantra, la relation sexuelle était certes une passerelle pour « basculer dans l’espace transcendant », mais qu’elle transformait aussi l’autre en simple piste d’envol. « Le contraire de ce que j’enseigne, où il s’agit d’incarner sa spiritualité et de vivre une sexualité fondée sur le fait d’être vraiment en relation avec son partenaire, et non d’avoir des relations avec lui », explique la philosophe.
Mêmes préconisations chez Brigitte Martel, auteure de Sexualité, Amour et Gestalt(InterÉditions, 2007) et gestalt-thérapeute, qui pointe les risques d’une sexualité sacrée soumise à de nouvelles contraintes de performance : « L’impératif d’avoir à communier ensemble dans l’extase serait l’équivalent spirituel de l’obsession de l’orgasme ou de l’érection parfaite. » La spiritualité n’est pas un adjuvant destiné à renforcer ou à sublimer une relation. « C’est une quête personnelle dont les effets vont se faire sentir dans la sexualité, et pas une quête dans la sexualité », nuance la psychanalyste Catherine Bensaid, auteure avec Jean-Yves Leloup de Qui aime quand je t’aime ? (Pocket, “Évolution”, 2007). Méditation, prière, relaxation, mais également recherche du beau, du bien, du vrai… toutes ces aspirations et pratiques favorisent l’éveil d’une conscience plus attentive, plus aimante et plus créative au moment des échanges avec notre partenaire.
Habiter entièrement son corps
Dans le tantra, comme dans les branches psychocorporelles de la thérapie, l’accent est mis sur un corps partenaire, soigné et regardé avec le maximum de bienveillance. « C’est un temple, un lieu sacré, qui nous permet d’être, d’être conscient d’être, et de pouvoir entrer en relation avec les autres, souligne Alain Héril. Se le rappeler régulièrement devrait nous faire éprouver de la tendresse pour lui. » Ainsi, en prendre soin, le toucher, le caresser augmente nos sensations et développe notre sensualité en élargissant nos zones érogènes à l’ensemble de notre corps. Le sexothérapeute poursuit : « Au moment de la rencontre sexuelle, c’est l’ensemble du corps qui va réagir, vibrer, l’“être-corps” va se dilater et se déployer, là, avec notre partenaire, et nous ouvrir à une autre dimension de nous-mêmes. »
Pour renforcer le lien avec notre corps, Brigitte Martel propose un exercice, pas aussi simple qu’il peut en avoir l’air : « Il s’agit de parler directement à notre sexe, lui dire nos attentes, nos gênes, nos plaisirs, nos peurs. Cette parole annihile les dissociations corps-sexe, et permet d’être à l’aise avec le regard, les mains et le sexe de l’autre lors de la rencontre sexuelle. »
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