Les oeuvres de vie
Posté par othoharmonie le 9 mai 2013
Les Œuvres de vie selon Maître Eckhart et Abhinavagupta
de Colette Poggi
C’est par l’étude comparée des œuvres philosophiques et religieuses de deux auteurs médiévaux majeurs, Maître Eckhart, théologien rhénan (XIIIe-XIVe) et Abhinavagupta, philosophe shivaïte du Cachemire (Xe-XIe), que Colette Poggi aborde le thème central de cet ouvrage : Les œuvres de vie. Celles-ci désignent l’expression spontanée, au sein de la vie quotidienne comme dans la pratique artistique, de la plus haute réalisation qu’est l’art de l’intériorité conjuguant action et contemplation. Cette vision du sens de l’existence repose tant pour Eckhart que pour Abhinavagupta sur un aspect original de leur doctrine : à leurs yeux le principe suprême est Lumière animée par un dynamisme vivant, Conscience absolue s’exprimant dans le déploiement cosmique.
Cette recherche accorde également une large place à la conception médiévale de l’Art comme voie de réalisation.
N° ISBN : 2-86681-086-4
Année de parution : 2000
Prix: 29.41 €
Poids : 340 Grs
Nb pages : 256
Extrait :
S’il est une raison essentielle qui justifie un rapprochement entre Maître Eckhart (XIVe siècle) et Abhinavagupta (Xe-XIe siècles), tous deux penseurs médiévaux, l’un occidental chrétien, l’autre cachemirien shivaïte, c’est qu’ils placèrent d’emblée, au centre de leur existence comme de leur œuvre, l’accès immédiat à la Réalité d’ordinaire voilée, grâce à une catharsis de la conscience. Pleinement engagés dans la vie spirituelle, riches d’une vaste érudition rassemblant tous les savoirs alors accessibles, ils s’attachèrent à la transmission de cette connaissance souvent indicible certes, mais passée au tamis de leur propre expérience, en approfondissant avec originalité le champ philosophique de leurs doctrines respectives.
Un autre trait original de leur métaphysique réunit Maître Eckhart et Abhinavagupta : il n’y a pas, selon eux, de place pour l’inertie ; le principe suprême lui-même est un pur dynamisme, acte créateur, vie surabondante qui, dans la langue imagée d’Eckhart, “ verdoie et fleurit ”, jaillit comme une fontaine, fulgure et scintille ; pour Abhinavagupta, vibration, élan, danse cosmique, émerveillement de sa propre essence. Par delà leur mode respectif d’expression ces deux mystiques de traditions différentes traitent avec une profondeur et une vigueur communes, et souvent étonnantes, de l’Art divin : génération du Verbe ou acte de conscience du point de vue de l’Absolu, création cosmique pour ce qui est de la manifestation.
…
Comme leurs témoignages le font explicitement savoir, leurs œuvres sont issues d’une nécessité intérieure d’écrire afin d’alléger l’humanité du fardeau de l’ignorance car “ nombreux sont les êtres ordinaires qui n’ont pas conscience de leur essence innée ! ” constate Abhinavagupta dans le traité de la Reconnaissance1.
Avant de donner un bref aperçu sur l’ensemble de cette étude, précisons que son thème essentiel porte sur l’Art — voie sans voie, par delà toute pratique extérieure —, tel que le conçoivent Maître Eckhart et Abhinavagupta, c’est-à-dire la “ connaissance de Dieu ” ou la “ Conscience suprême ”, ainsi que les modes variés (arts) de réalisation.
Après une présentation des deux maîtres (première partie), de leur vie, leurs œuvres et du contexte dans lequel ils évoluèrent, une approche de leur doctrine (deuxième partie) montrera à quel point elles participent du même dynamisme. Le principe ultime est “ Acte de conscience ”, “ Parole suprême ” ou “ Verbe divin ” qui est par nature conscience de soi et expression ; il est évoqué par Eckhart comme un débordement, un bouillonnement de plénitude et, par Abhinavagupta, sous forme d’une vibration cosmique (spanda) qui donne vie à tout ce qui est.
Au cours de la troisième partie nous aborderons le “ Jeu divin ”, charnière entre l’Absolu et la manifestation (issue du désir divin d’être connu), source de la temporalité et de la dualité. Quant à l’être humain, il éprouve en sa conscience cette diversification engendrée par la Måyå (illusion cosmique2). Il est néanmoins en son pouvoir de refluer vers la source : instant d’éternité, hors du temps.
Sur l’auteur :
Colette Poggi mène des recherches sur le Shivaïsme du Cachemire et les philosophies de l’Inde depuis le début de ses études universitaires à Aix -en-Provence en 1977; elle aborde alors deux cursus : Littérature et Civilisation germanique d’une part, Etudes indiennes et Sanscrit d’autre part. Dans le cadre de son Doctorat, en 1986 , elle met en évidence les correspondances entre le plus grand philosophe du Cachemire médiéval, Abhinavagupta, et l’un des plus éminents mystiques et théologiens d’Occident, Maître Eckhart. Afin d’approfondir sa connaissance et de rencontrer d’autres chercheurs, Colette Poggi poursuit alors des recherches à Paris dans le cadre d’une équipe CNRS, à Oxford, et à la Sorbonne en Philosophie comparée avec M. Hulin. Elle présente en 1994 pour un doctorat de Philosophie en Sorbonne la traduction intégrale de l’ÎshvaraPratyabhijñâVimarshinî, texte fondamental d’Abhinavagupta qui porte sur l’expérience de la Re-connanissance intérieure comme voie immédiate de Délivrance. Actuellement, Colette Poggi enseigne le sanscrit et la pensée indienne dans divers centres universitaires, tout en poursuivant ses recherches et ses traductions sur le Shivaïsme du Cachemire.
Colette Poggi donne une série de conférences au Musée Guimet dont le thème est » Regards sur l’expérience esthétique en Inde ancienne ».
Laisser un commentaire
Vous devez être connecté pour rédiger un commentaire.