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Pourquoi avons-nous besoin de rituels ?

Posté par othoharmonie le 14 juillet 2013

 


 

Pourquoi certains adorent-ils Noël alors que d’autres prennent la fuite ? Pourquoi réinvente-t-on les traditions ? Peut-on vivre sans rituels ? Une psy et une philosophe échangent leurs points de vue.

On adore ou on déteste  les rituels. Pourquoi ?

 Pourquoi avons-nous besoin de rituels ? dans L'Esprit  Guérisseur abhinavagupta-inde-anime

 Sylvie Angel : Les rituels sont des moments de réunion plus importants qu’au quotidien, et qui dit réunion dit cristallisation des conflits, inquiétudes et anxiétés. Les repas de Noël, par exemple, sont souvent forts en tensions réactivées, surtout quand il faut aussi gérer la complexité des familles recomposées : tous les ingrédients sont là pour que ça explose ! De surcroît, celles-ci se retrouvent avec deux ou trois Noël à célébrer, à des dates parfois fantaisistes : le 28 février, pour une famille que je reçois en thérapie et qui ainsi est sûre de ne pas empiéter sur les autres Noël. J’en connais une autre qui a instauré « son » Noël le 14 juillet, qui a l’avantage d’être un jour férié. 

Mais on peut aussi adorer ces fêtes et leurs rituels. Elles permettent de revoir la famille élargie. Chacun met du sien pour que ces retrouvailles se passent bien, il y a le plaisir de voir les enfants découvrir leurs cadeaux… Mais un mot maladroit peut tout gâcher, voire faire exploser le groupe. Noël est un rite culturel religieux d’appartenance et d’union familiale : on fête Noël « en famille ».

 Frédérique Ildefonse : Je suis d’accord, on déteste les rituels quand on ne peut pas les associer à la fête, quand il n’y a pas de réunion possible entre les présents. On les déteste aussi parce qu’ils se sont réduits à la consommation : de nourriture plus ou moins luxueuse, de cadeaux qui s’accumulent sans qu’un sens soit exprimé, sans qu’une féerie permette d’aller au-delà du strict aspect compulsif. 

Un rituel produit un entrelacement entre l’action et la perception. La féerie est l’état réussi de cet entrelacement. J’ai assisté à des rituels de candomblé, au Brésil. Il y a de la musique, de la danse, de la lumière, des gestes ; il y a la transe et ce qui vient l’envelopper – d’autres personnes sont là pour contenir ou assister celui qui est en transe. La perception est en permanence sollicitée : cette très grande richesse s’oppose à la désolation que l’on constate souvent chez nous où la seule richesse vient de la consommation. Dans nos sociétés, le rituel peut nous relier à notre enfance, ou à une autre, celle que nous n’avons pas eue et que nous vivons alors. 

Peut-on réinventer les traditions?

 Sylvie Angel : Comparés au candomblé où tout est codifié, programmé, organisé comme un spectacle, nos rituels se sont appauvris. La mort, par exemple, s’est banalisée : on ne porte plus le deuil, on ne prend plus le temps de la ritualiser et, dans les entreprises, une journée à peine est accordée aux salariés endeuillés. A l’inverse, les naissances, plus rares qu’autrefois, se sont fortement ritualisées et des rites personnalisés sont inventés. Il en va de même pour les mariages, bien qu’un sur deux finisse par un divorce : chacun organise sa fête, avec les amis, la famille, parfois dans des destinations lointaines, et en surinvestissant ce moment. 

Dans notre société qui manque de rituels, on en invente de nouveaux, tel le baccalauréat, couvert par les télévisions et qui concerne l’ensemble de la famille. Certaines fêtes deviennent « traditionnelles » comme, depuis quelques années, le rassemblement des bacheliers sur le Champ-de-Mars, à Paris. Et on adopte des rituels venus d’ailleurs, tel le nouvel an chinois. L’innovation touche aussi des fêtes plus traditionnelles, y compris Noël, que l’on ne réinvente peut-être pas, mais que l’on peut célébrer de manière atypique, y compris à une autre date, tout en continuant de l’appeler Noël pour ne pas se démarquer de l’ordre établi. On n’annule pas la tradition, on se plie aux injonctions de la société, mais avec une créativité intéressante. 

 Frédérique Ildefonse : Le rituel est une sortie de la contingence – c’est ce que j’ai compris de l’expérience que j’en ai eue, et après y avoir réfléchi par rapport à l’Antiquité grecque. Autrement dit, il suspend la nécessité permanente d’inventer à laquelle nous voue la contingence : dans le rituel, on n’est plus dans la décision, on s’inscrit dans la tradition. On ne se pose même pas la question d’y entrer ou pas : on s’y trouve inscrit. Dans ce rythme imposé, le rassemblement s’opère de manière symbolique – j’entends par « symbolique » ce qu’on utilise sans être en mesure de le définir précisément. Je ne décide pas de la date ni de l’heure : l’année est rythmée de telle sorte que c’est à ce moment-là que la communauté se rassemble pour une cérémonie qui se déroule de telle manière et non d’une autre. Il y a levée de l’injonction permanente, que nous vivons tous, à nous investir, à produire de nouvelles significations, à être dans la vigilance. 

C’est ainsi que le rituel est un apaisement. Je ne dis pas pour autant qu’il faille entrer dans une matrice aliénante, ni se soumettre et se démettre totalement de notre capacité à inventer.

Un rituel est il forcément d’essence religieuse ?

 Frédérique Ildefonse : Il me paraît essentiellement lié au religieux, en tout cas au sacré défini comme une chose qui se produit dans le voisinage d’événements fondamentaux. Vous parliez, Sylvie Angel, de la naissance et de la mort : ce sont des moments qui trouent à tel point la trame du réel qu’il faut les envelopper, les inclure dans une scène que nous n’aurons pas nécessairement à chercher à comprendre. 

J’ai parlé de sacré, je pourrais aussi dire « divin », au sens où l’entend le philosophe Jean-Luc Nancy qui a travaillé à la fois sur le christianisme et le paganisme : le divin, dit-il, désigne le fait de ne pas en rester aux rapports que nous entretenons de manière ordinaire avec les choses et les êtres du monde. Dans un second temps, les rituels viennent assurer le rassemblement de la communauté.

 Sylvie Angel : Il existe des rituels religieux par essence et, pour certains d’entre nous, ils répondent à un besoin de sacré. Mais je pense que la volonté de restaurer le lien social est le fondement de la majorité d’entre eux – ils répondent à un besoin de social. Prenons les rituels de la mort. C’est aux Célèbes, en Indonésie, que j’ai assisté aux plus belles cérémonies. Quand il y a un décès, on réunit toute la diaspora pour une grande fête qui dure plusieurs jours. Mais dans une société très pauvre, pour que tous puissent être là, il faut parfois attendre deux, trois, quatre ans. Le corps du défunt est embaumé, on le garde à la maison, on fait semblant de le nourrir tous les jours, on organise un rite quotidien autour de lui. Mais le vrai rituel, c’est la fête, et celle-ci est très gaie, dominée par l’idée de restaurer la cohésion du groupe. La mort est transcendée par les retrouvailles. Certes, au bout de ces années, le travail de deuil a été effectué, la douleur est modifiée et le rituel, qui mêle émotionnel et relationnel, est surtout là pour marquer l’identité du groupe. C’est pourquoi, quand je reçois une famille en consultation, j’évalue comment elle gère les rituels et si elle en invente : sans eux, la cohésion familiale se délite.

 

Est-ce structurant pour l’individu ?

 Sylvie Angel : Les rituels ont évidemment un rôle structurant pour chacun d’entre nous : ils nous permettent d’avancer dans la vie, de dépasser des traumatismes, des douleurs. J’invite souvent ceux qui viennent me consulter à inventer leurs propres rituels. Je me souviens d’un patient qui, chaque année, en octobre, n’allait pas bien. Il n’avait pas lié son état à la perte, quelques années plus tôt, en octobre, d’un être cher dont il n’avait jamais fait le deuil, faute de rituels. Je lui ai demandé d’en instituer un : d’allumer une bougie, d’appeler sa famille, de marquer ce jour de manière à permettre le cheminement émotionnel qui l’aidera à mieux gérer son vécu par rapport à cet événement significatif de son histoire. 

Nous connaissons les étapes de la vie, mais nous ne les marquons pas toujours suffisamment. Cela aboutit à des désorganisations. Ce constat est valable au sein de chaque individu, de chaque couple, et bien sûr du groupe.

Frédérique Ildefonse : Ils libèrent surtout de la nécessité permanente d’un investissement qui ne soit que personnel, c’est-à-dire de la logique individuelle de clôture sur sa propre identité, dans un strict rapport à soi. Celui qui participe à un rituel n’est pas clos sur soi, il est dans un maillage, dans un tissage de la communauté. Le fait d’être dispensé du rapport à soi, ou du moins de le voir limité, apaise, voire libère. Je rejoins Alain Badiou qui, dans son « Eloge de l’amour », affirme que l’amour nous indique bien qu’on n’en reste pas à l’individu. Un rituel n’est jamais individuel : c’est toujours une rencontre entre au moins deux individus qui cessent alors d’être « individuels ». On donne l’exemple de l’explorateur anglais qui, seul dans la jungle, revêt son smoking pour le réveillon. Est-il seul ? Non, il se présente ainsi comme le membre visible d’une communauté invisible.

  Peut on vivre en groupe sans rituels?

 Sylvie Angel : La vie en société impose un minimum de rituels : les jours fériés, le rythme naissance-vie-mort… De fait, tout groupe établit des rituels, parfois à son insu, et parfois sous forme de non-rituels. Le fait même d’être dans la non-célébration nous place déjà dans une démarcherituelle, par opposition à tous ceux qui célèbrent ! Ne pas fêter Noël, « annuler cette fête », c’est se démarquer de l’ordre. Alors, certains choisissent cette date pour s’éloigner, voyager dans des pays où l’on ne fête pas Noël. Ce rituel leur permet d’éviter la confrontation douloureuse avec les autres. 

La question est aussi de savoir quand une activité régulière devient un rituel. Je pense aux femmes qui se réunissaient autrefois au lavoir : au-delà de laver leur linge, elles se parlaient, échangeaient, mais ne voyaient pas ce travail comme un rituel. Ces réunions ont été qualifiées ainsi quand elles ont disparu, elles ont été érigées en rituel dans le souvenir, par leur absence. On a compris après coup qu’elles avaient une fonction de cohésion par rapport au groupe, bien plus importante que le simple fait de laver le linge. Et l’on peut étendre ceci à de nombreuses activités de ce type.

 Frédérique Ildefonse : Quand il y a rupture au sein d’une famille, que les liens ne peuvent plus être restaurés, on se crée une communauté d’un autre ordre où se perpétue la fonction des rituels. Comme l’affirment les sociologues, un groupe a besoin de rituels pour se reconnaître comme existant. Nous avons besoin de leur féerie, de la temporalité et de l’espace différents qu’ils nous ouvrent, de la modification du régime ordinaire des affects qu’ils nous apportent. Nous avons besoin de sortir de notre régime ordinaire.

 Source http://www.cles.com/

 

Publié dans L'Esprit Guérisseur, PENSEE MAGIQUE - LEITMOTIV et RITUELS | Pas de Commentaire »

Régression par l’osthéopathie

Posté par othoharmonie le 14 juillet 2013

Régression par l’osthéopathie dans Guérir en douceur image_front_1_

Sans remonter à l’origine du monde et des bactéries, sommes-nous dans la même logique, quand un ostéopathe, pour soigner une personne qui ne peut plus se redresser parce qu’elle souffre d’un lumbago, la met d’abord à quatre pattes, l’invitant ainsi à régresser au stade des mammifères quadrupèdes et à y retrouver un terrain et des défenses utilisables ?

Si vous voulez, mais les ostéopathes préfèrent souvent manipuler une personne sur le côté, afin d’utiliser les épaules et le bassin dans un geste en torsion, autre mouvement archaïque s’il en est, puisque les crustacés remettaient déjà leurs articulations en place ainsi !

Ce qui est cependant évident c’est que cette personne n’a pas trouvé la solution (résidant dans un processus archaïque qu’elle porte en elle), puisque, justement, elle est bloquée et a besoin de l’aide d’un tiers ! En principe, tous ces mécanismes auto-réparateurs passent inaperçus, dans le « silence des organes » qui caractérise la bonne santé. La question surgit évidemment quand le processus ne fonctionne plus. Pourquoi ce monsieur souffre-t-il de ce trouble chronique, mettons de cette entorse récidivante, pour en rester à notre exemple de tout à l’heure ?

Si nous poursuivons notre raisonnement dans la même logique, cette entorse est le symptôme, donc la partie visible d’un enchaînement dont la cause initiale, disions-nous, peut remonter très loin et s’avérer de nature extrêmement variée – un deuil, un échec, une déception professionnelle… Admettons que ce soit le fait que sa femme l’ait quitté. A priori, nous ne pouvons pas le savoir – et lui non plus, d’ailleurs, ne fait pas le rapprochement.

Tout ce que nous savons, c’est qu’il présente ce symptôme-là, donc que son processus autoguérisseur s’est bloqué à ce niveau – à cette époque phylogénétique, dans la recherche d’une solution parmi les processus récupérateurs mémorisés au cours l’évolution. Si le processus réparateur de l’entorse remonte à l’époque des arthropodes, eh bien, ce patient ne réussit pas à utiliser en lui-même une « solution arthropode ».

Souffrant en fait, à l’origine, du fait que sa femme l’a quitté, ce monsieur se fait entorse sur entorse, autrement dit, il est bloqué, en panne, à ce niveau-là de sa mémoire Il existe une résonance entre ces deux faits qui n’ont apparemment pas le moindre rapport entre eux. Le micro-ostéopathe découvre la coïncidence entre l’événement difficile et la mise en panne d’un processus archaïque – dans le cas présent : refaire une articulation stable pour pouvoir continuer à vivre. L’incapacité à récupérer sa cheville pour cet homme matérialise par un symptôme son incapacité à continuer à avancer dans sa vie. C’est pourquoi je dis que son histoire est inscrite en lui au sens biologique. On retrouve là le psychosomatique classique évoqué par la médecine, mais expliqué par l’évolution. L’aspect psy est indéniable, mais sa prise en compte appartient au psychothérapeute plutôt qu’à l’ostéopathe…

Mais comment expliquer cette résonance entre tel aspect psy et telle incapacité à mettre en branle un processus physiologique archaïque ?

Ma recherche est d’abord thérapeutique. Je ne suis pas un scientifique, mais une sorte d’ouvrier de la médecine. Ce qui m’intéresse, c’est d’abord de soigner. Autrement dit, d’aider mon patient à dépasser ce blocage et à utiliser tous les possibles existants à l’intérieur d’un organisme : son potentiel autoréparateur.

Ma principale réponse sera donc empirique : je peux vous dire comment nous procédons pour, effectivement, débloquer des processus récupérateurs anciens – essentiellement en nous mettant à l’écoute très attentive de nos patients, et cela demande une qualité de présence que seule une longue pratique peut vous apporter. Mais il ne m’est pas impossible auparavant, sinon de répondre à votre question sur le plan théorique, du moins de cerner en gros le terrain de recherche d’où elle pourra vraisemblablement se dégager un jour, c’est bien entendu l’ontogenèse de la personne, autrement dit son histoire embryonnaire et fœtale, qui entre ici en jeu.

Extrait de  Philippe Petit « La guérison nous vient de nos mémoires archaïques » 

 

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Les 7 raisons de croire en Dieu

Posté par othoharmonie le 14 juillet 2013

Les 7 raisons de croire en Dieu dans Chemin spirituel dieu

De plus en plus d’intellectuels ou d’écrivains s’en réclament. Les scientifiques continuent de spéculer sur son existence. Les athées militants contribuent à la polémique. N’en déplaise à Nietzsche, Dieu n’est pas mort. Peut-on raisonnablement faire l’inventaire des raisons d’y croire? On peut… 

1. Parce qu’à l’horloge il faut un horloger

Cet argument est l’un des plus vieux de l’histoire de la philosophie. On le trouve dans la Physique d’Aristote (né en 384 av. J.-C.), disciple de Platon et précepteur d’Alexandre le Grand: tout être en mouvement reçoit son mouvement d’un autre être, tel le stylo qui écrit reçoit le mouvement de ma main. On pourrait remonter à l’infini, de mouvement en mouvement, mais voilà: le monde d’Aristote est clos et fini, d’une rotondité parfaite. Tôt ou tard, il faut bien se heurter à un premier moteur immobile: Dieu.  

L’argument sera repris par la théologie chrétienne, mais dans un contexte radicalement nouveau: le monde aristotélicien, tout rond qu’il est, est éternel. Il tourne depuis toujours. Le monde chrétien, au contraire, a surgi un jour des mains de Dieu. L’image d’un Dieu créateur va alors projeter sur le premier moteur l’ombre du mécanicien. La dynamo divine serait derrière l’instant zéro, tapie sous la première seconde de l’univers. Voltaire et les Lumières conserveront cette image: Dieu est un horloger qui, un beau matin, crinqua les ressorts à fond. Et hop, à la bonne heure.  

Cette compréhension du premier moteur se retrouve aujourd’hui dans les interprétations religieuses de la théorie du big bang. La dernière découverte, le boson de Higgs, n’est-elle pas surnommée « particule de Dieu » (voir la preuve suivante)? Rien à voir cependant avec Aristote: son premier moteur n’est pas premier au plan numéraire mais au plan hiérarchique. Surtout, étant immobile, il n’a pas de puissance motrice comme le ressort de l’horloge. Il ne donne pas une chiquenaude au monde pour le mettre en branle, mais il l’enveloppe et l’attire à lui comme le beau attire l’âme. Il transmet le mouvement en suscitant le désir. Il est le bien et la perfection à laquelle l’univers aspire.  

2. Parce qu’une particule porte son nom

La « particule de Dieu », dit-on d’un mystérieux boson. Le papa s’appelle en fait Peter Higgs, physicien britannique qui avait postulé son existence dès les années 1960. Si l’on se réfère à la théorie du big bang, le boson de Higgs permet d’expliquer comment les particules élémentaires ont pu acquérir une masse dans les premiers temps de l’Univers. En 1964, Higgs et deux confrères émettent simultanément et indépendamment l’hypothèse qu’elles auraient « engraissé » en se cognant à un boson qu’aucun physicien n’avait encore jamais rencontré.  

Ce qui fut découvert au Cern cet été est un nouveau boson dont il reste à prouver qu’il est bien le fils légitime de son papa. Quant à Dieu, il y a autant d’extrapolations à faire pour arriver à lui que d’intermédiaires à franchir pour avoir un conseiller clientèle au bout du fil de votre opérateur télécom. Reprise dans les médias, l’expression « particule de Dieu » n’est qu’une boutade du physicienLeon Lederman, qui voulait parler de cette « nom de Dieu de particule » que tout le monde cherchait sans succès.  

Le juron s’est transformé en action de grâce du fait de la proximité de la théorie du big bang avec l’idée d’un Dieu créateur. Supposant un commencement de l’Univers, cette théorie reste aujourd’hui le modèle dominant en physique. Pour certains fondamentalistes, pas de doute: le big bang est bien le « God bang ». Interprétation peu respectueuse de son inventeur, le chanoine Lemaître (1894-1966), astronome et prêtre catholique. En 1952, Lemaître dut réfréner l’enthousiasme papal devant la rave cosmique devenue une preuve trop tentante: « J’ai dit commencement, je n’ai pas dit création. Personnellement j’estime que [la théorie du big bang] reste entièrement en dehors de toute question métaphysique ou religieuse. » C’est le chanoine qui l’a dit. 

3. Sinon tout est permis

Que deviendra l’homme, sans Dieu [...]? Tout est permis, par conséquent? » demande Dmitri Karamazov à Rakitine, jeune arriviste attiré par les sciences nouvelles. « Ne le savais-tu pas? Tout est permis à un homme d’esprit. » Un siècle avant Les Frères Karamazov, Voltaire se réjouissait déjà que son valet et sa femme crussent en Dieu – il avait l’impression de se faire moins rouler. Vite dit. Depuis les années 1960, sur fond d’éclipse de Dieu et de perte d’aura des sciences, on assiste un véritable renouveau de la philosophie morale.  

En France, en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, jamais la question du juste et de l’injuste n’a été si disputée ni autant théorisée. Sans référence à une transcendance radicale, mais à partir du libre exercice de la raison. Les voies ne manquent pas, indiquant d’abord des styles de raisonnement, des postures: peut être qualifié de moral un acte dont l’impact augmente le bonheur collectif (utilitarisme), respecte des principes moraux qui se trouveraient à l’intérieur de la raison (morale déontologique) ou contribue à la réalisation de soi (éthique des vertus). De son côté, l’éthique évolutionniste – courant de pensée qui inscrit l’apparition de la morale dans l’évolution des espèces – est revenue depuis les années 1980 au premier plan des débats philosophiques. Elle avait été laissée en jachère un demi-siècle durant, après les tentatives darwiniennes de trouver chez certaines espèces animales les prémices de la moralité humaine. L’idée, à nouveau, fait son chemin: ne peut-on déceler dans le comportement des chimpanzés des traces d’empathie, une capacité à se consoler, à se réconcilier, à traiter les membres handicapés du groupe de manière particulière? Alors, sans Dieu, tout est permis? Le bonobo rit de toutes ses belles dents blanches. 

4. Parce que le diable existe

L’inverse est plus naturel: l’existence de Dieu n’est-elle pas contredite par un monde où des enfants sont torturés? C’est l’objection du docteur Rieux au père Paneloux dans La Peste(1947), de Camus. Mais, paradoxalement, le mal qui défiait Dieu semble être dans nos discours la dernière trace d’une transcendance. Alors que pour les Anciens le mal était sans profondeur, un simple trou d’être, il retrouve aujourd’hui la figure du sacré. Qu’on se rappelle les Unes du 11-Septembre: « Au-delà du crédible », « Indicible ».  

Loin des gros titres, la mémoire de la Shoah est le lieu également d’un langage intransitif, dressé à la verticale du monde. Pour s’opposer en 1994 au film de Steven Spielberg La Liste de Schindler, Claude Lanzmann rapatrie les mots et les interdits de l’absolu: « L’Holocauste est d’abord unique en ceci qu’il édifie autour de lui, en un cercle de flammes, la limite à ne pas franchir parce qu’un certain absolu d’horreur est intransmissible. La fiction est une transgression, je pense profondément qu’il y a un interdit de la représentation. » Ce langage de l’extrême laisse l’horreur en suspens, l’empêchant de se dissoudre dans les aléas de l’Histoire ou les explications sociologiques. Cette expérience moderne n’est pas une question de nombre de morts, de degré de souffrance, puisque cela contredirait la notion même d’absolu. Mais sur quoi fonder un tel discours, sinon l’impossibilité de tout autre discours? Face au mal, la raison n’offre que deux possibilités: en reconnaître malgré tout la « banalité » – c’est le regard qu’Hannah Arendt porte sur Eichmann lors de son procès à Jérusalem: portrait d’un homme « tout à fait ordinaire, comme tout le monde, ni démoniaque ni monstrueux » – ou affirmer la possibilité de sa radicalité, au risque de l’absolu. 

5. Chaque fois que j’écoute Bach

Forcément, ça marche moins bien avec les Rita Mitsouko… Un petit peu mieux avec la Messe en ut mineur de Mozart. Mais avec Bach, le Magnificat ou la Passion selon saint Jean, là, c’est direct, l’autoroute vers le ciel. « Il parle un langage qui va au tréfonds de l’âme, un langage qui fait croire », disait de lui Julien Green, le jugeant plus profond que Mozart. Des deux, c’est toujours le premier qui gagne. Mozart? Trop mécanique. Alors que Bach transporte nos sens aux portes de l’éternité. Le temps d’une brève extase, il redonne espoir aux plus amers, tel Cioran: « S’il y a quelqu’un qui doit tout à Bach, c’est bien Dieu », confessait ce grand pessimiste.  

D’autres ne s’en remettent jamais, comme le poète Paul Claudel, athée convaincu qui franchit le jour de Noël 1886 le porche de Notre-Dame: « Les enfants de la maîtrise étaient en train de chanter ce que je sus plus tard être le Magnificat. En un instant mon coeur fut touché et je crus. » Si le ciel s’ouvre soudain au-dessus de sa tête, il garde les pieds sur terre: « J’étais debout, près du deuxième pilier, à droite, du côté de la sacristie. » Au cas où la police l’interrogerait. Personne n’était mort pourtant, sinon le vieil homme en lui. Et si ce jour-là Mlle Le Long Bec avait entonné Il est né le divin enfant? L’audition fonctionne par suggestion; on entend ce que l’on veut entendre, comme nos vieux parents. Avec humour, le théologien Karl Barth (1886-1968) écartait toute définition religieuse de la bonne musique, celle qui élèverait l’âme aussi sûrement qu’un ascenseur: « Je ne suis pas sûr que les anges, quand ils cherchent à glorifier Dieu, jouent de la musique de Bach. Je suis certain, en revanche, que lorsqu’ils sont entre eux, ils jouent du Mozart. » 

6. Parce que Dieu me l’a dit

Ce n’est pas une raison! La raison suppose un terrain commun de discussion. Il faudrait être tombé de cheval avec saint Paul, avoir vu la Vierge avec saint Ignace. En fait, même s’ils prétendent être uniques, les récits de conversion forment de véritables traditions littéraires, comme le polar nordique. A la fin du IVe siècle, Augustin, pleurant tout son désespoir dans le jardin de sa maison à Milan, entend par-dessus le muret une ritournelle « Prends et lis ». L’interprétant comme un ordre, il ouvre la Bible au hasard et se convertit au Christ.  

Passons au Siècle d’or espagnol: alors qu’elle traverse une longue nuit spirituelle, Thérèse d’Avila tombe un jour sur un livre d’Augustin. Elle découvre le récit de sa conversion et, à nouveau, c’est le tsunami: les larmes coulent à flots, son coeur s’ouvre au Christ. Rattrapons enfin Paul Claudel (voir la preuve précédente) qui rentre chez lui la nuit de Noël encore tout électrisé par la récente foudre. Il ouvre la Bible au hasard et… vous devinez la suite. Etranges réminiscences à travers les siècles. C’est la loi des séries: entre 1969 et 1976, le journaliste André Frossard, le philosophe Maurice Clavel et le romancier Didier Decoin racontent leur conversion dans un livre, comme si chacun lisait par-dessus l’épaule de l’autre. « Cela s’est-il vraiment passé comme cela? » n’est pas la bonne question. Parce qu’ils sont rédigés toujours après coup, ces récits organisent les faits d’une certaine façon, à la forte portée symbolique (la chute au sol, le thème de l’enfance ou de l’enfantement). La forme racontée dramatise, contracte le temps autour de la crise, divise violemment la vie en deux. Surtout, elle s’imprègne d’une tradition pour trouver des mots qui viennent difficilement. Pour être moins seul avec ce qui s’est passé, sans doute. 

7. Parce que nous pensons à lui

C’est la preuve la plus grandiose et la plus intime, celle qui traverse mille cinq cents ans d’histoire. Elle apparaît dans toute sa clarté chez Anselme de Cantorbéry (1033-1109), alors abbé du Bec, abbaye nichée dans une vallée normande verdoyante: même l’incroyant a une idée de Dieu, qui est celle d’un être « tel que rien de plus grand ne puisse être pensé ». Or, une chose qui existe a plus de poids que sa seule idée – quand on se cogne la tête, on fait la différence. Donc, si Dieu n’existait pas, je pourrais penser à un autre être suprême qui aurait en plus l’existence – un être plus suprême que suprême, donc; comme la lessive qui lave plus blanc que blanc. Ce qui contredit le point de départ. La pensée de Dieu implique donc son existence.  

Quelques siècles plus tard, Descartes use d’un argument similaire: quand j’examine mes pensées, je trouve en moi l’idée d’un être éternel et infini. Je ne peux en être la cause, car mon intelligence est finie et je n’ai rien en moi qui permette de construire un tel infini – je n’approche l’infini qu’en ajoutant des morceaux de fini. Conclusion: je n’aurais pas l’idée de l’infini si elle n’avait été mise en moi par un être infini. Au XVIIIe siècle, Kant réfuta la preuve d’une boutade: 100 euros rêvés ont la même valeur pécuniaire que 100 euros réels, l’existence ne change rien au concept; par contre, elle m’aide à payer mon loyer. Plus proche de nous, le grand logicien Bertrand Russell eut une position plus subtile, toute à son ironie: l’argument est peu recevable mais difficilement réfutable! Si elle semble au premier abord bien abstraite, cette preuve nous apprend que si les chevaux ailés et les fées disparaissent au réveil, demeurent dans notre esprit des idées si hautes et si incompréhensibles qu’elles ne nous laissent pas en paix. 

fleches-7 dans DIEU

>> L’Express a listé trois autres raisons de croire en Dieu. Saurez-vous les retrouver dans le magazine en vente en kiosque cette semaine 

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