Dialogue intérieur
Posté par othoharmonie le 2 décembre 2013
LE DIALOGUE INTERIEUR,
POUR DEVENIR CE QUE NOUS SOMMES PROFONDEMENT
« Il était une fois une tigresse qui allait mettre bas. Un jour où elle chassait, elle découvrit un troupeau de chèvres. Malgré son état, elle réussit à en tuer une. Toutefois, le stress d’avoir chassé précipita le travail et elle mourut en donnant naissance à un petit mâle. Les chèvres, qui s’étaient enfuies revinrent lorsqu’elles sentirent que le danger était passé. S’approchant de la tigresse morte, elles trouvèrent son bébé et l’adoptèrent, l’intégrant à leur troupeau.
Le petit tigre grandit parmi les chèvres, persuadé d’en être une lui aussi. Il bêlait de son mieux, avait l’odeur d’une chèvre et ne mangeait que des végétaux ; tout son comportement était celui d’une chèvre. Pourtant, tout au fond de lui, comme nous le savons, battait un cœur de tigre.
Tout se passa bien jusqu’au jour où un tigre plus âgé vint à s’en prendre au troupeau et tua l’une des chèvres. Les autres s’enfuirent dès qu’elles virent ce tigre, mais notre tigre/chèvre ne vit aucune raison d’en faire autant, bien sûr, car il ne percevait aucun danger.
Bien que vétéran de nombreuses chasses, le vieux tigre n’avait jamais été aussi choqué de toute sa vie que face à cet animal. Il ne savait que faire de ce tigre adulte qui avait une odeur de chèvre, bêlait comme une chèvre et agissait en tout comme une chèvre. Etant un vieux grognon, pas particulièrement altruiste, il prit le jeune tigre par la peau du cou, le tira jusqu’à une crique proche et lui montra son reflet dans l’eau. Mais le jeune tigre n’eut pas de réaction devant son reflet ; il n’avait aucune signification pour lui et il ne remarqua pas la similitude avec le vieux tigre.
Frustré par son incompréhension, le vieux tigre le ramena à la place où il avait tué sa proie.
Puis il arracha un morceau de viande de chèvre morte et le fourra dans la gueule de notre jeune ami. Nous pouvons imaginer le choc et la consternation du jeune tigre. D’abord il s’étouffa et essaya de cracher la viande crue, mais le vieux tigre était déterminé à montrer au jeune qui il était vraiment et il voulait s’assurer que ce petit mange sa nouvelle nourriture. Quand il fut certain qu’il avait avalé, il lui mit un autre morceau de viande dans la gueule et cette fois, un changement se produisit.
Notre jeune tigre se permit de goûter la chair crue et le sang chaud et il mangea avec plaisir.
Lorsqu’il eut fini de mâcher, il s’étira puis, pour la première fois de sa jeune vie, émit un puissant rugissement – le rugissement du chat de la jungle. Puis les deux tigres disparurent ensemble dans la forêt. »
Extrait de « Le Dialogue intérieur, connaître et intégrer nos subpersonnalités », Hal et Sidra Stone- Editions Souffle d’Or.
Cette histoire est racontée dans l’introduction du livre d’Heinrich Zimmer La Philosophie de l’Inde (The Philosophie of India), où ce rugissement du jeune tigre est appelé « le rugissement de l’éveil », ce qui représente la découverte de notre nature fondamentale instinctive. Cette histoire nous dit que nous devons devenir pleinement ce que nous sommes, et que nous sommes plus que ce nous pensons être ! Nous avons revêtu des identités, porté des masques qui n’expriment pas complètement notre être essentiel. Pour notre développement personnel il nous faut comme sortir du rêve dans lequel nous sommes et devenir conscients de notre réalité.
Dans cette histoire, du fait de son éducation et de son expérience du monde, notre jeune tigre croît réellement être une chèvre avant de rencontrer son vieux frère de race. Nous savons pourtant qu’il est capable de bien d’autres choses que ce qu’il a expérimenté dans sa vie de chèvre. En termes de Dialogue Intérieur, nous pouvons dire qu’il n’a manifesté que sa
« Sous-personnalité » de chèvre avant de rencontrer le vieux tigre qui l’a éveillé à son être essentiel : le tigre qu’il est réellement.
Symboliquement, cette histoire parle de nous. Nous sommes tous élevés en fonction des modes de cultures de nos familles. Nous apprenons à penser, sentir, agir et voir selon des manières prédéterminées. Ces perceptions étant notre seule expérience, nous pensons qu’elles sont le reflet de la réalité du monde extérieur et de notre monde intérieur, de notre personnalité. Pourtant, n’avez-vous jamais eu ce sentiment de mal-être intérieur, mal dans votre peau ; de ne plus savoir qui vous êtes, ce que vous voulez, où vous allez, parfois même avec une pénible impression de devenir fou ?
Ainsi, vous vous retrouvez par exemple dans la situation difficile de faire un choix : coincé entre différentes « voies » intérieures, l’une disant « oui, » l’autre « non », une troisième en proie au doute avec un « peut-être », voir une quatrième qui refuse carrément de choisir et vous amène à fuir tout bonnement, et d’autres encore peut-être… Trop de choix, tue le choix direz-vous ! Cependant nous nous retrouvons comme « l’âne de Buridan » (d’après Jean Buridan, philosophe français du XIVème siècle). Selon la légende, cet âne est mort de faim et de soif entre son picotin d’avoine et son seau d’eau, faute de choisir par quoi commencer… ça vous rappelle quelque chose ? Sûrement… C’est un état que nous connaissons tous ! Ou bien encore, vous vous dites parfois : « c’est plus fort que moi, je ne peux pas m’empêcher de… », comme si une force surnaturelle vous manipulait comme de vrais pantins.
L’Homme est complexe, à la fois Dr Jekyll et Mr Hyde, Victime et Bourreau, Ange et Démon.
Notre multiplicité intérieure revêt parfois un aspect paroxystique ! Notre vie psychique est ainsi à l’image d’un théâtre, à l’intérieur duquel jouent nos différentes « sous-personnalités », nos acteurs intérieurs, ces différentes « voies » ou « énergies » qui nous animent. Ainsi parfois, des aspects inconnus de nous se révèlent dans certaines circonstances, pour notre plus grande joie ou notre plus grande honte, en fonction de nos valeurs personnelles. Nos actes de bonté ou de bravoure peuvent tout aussi bien nous surprendre que nos lâchetés, nos mouvements de jalousie, de colère, voir de rage féroce. On se dit alors « je ne me croyais pas capable de… »
Tous les jours nous faisons appel à différents aspects de nous. Ce sont tout simplement les différents « costumes » dont nous nous habillons pour correspondre aux rôles que nous sommes amenés à jouer en fonction de nos capacités, de nos talents, de notre Environnement. Ainsi, vous savez très bien que vous ne vous comportez pas à la maison comme dans votre activité professionnelle. Vous savez également que dans la vie privée, vous êtes amenés à jouer selon les circonstances, différents rôles d’enfant, de parents, de frère ou de soeur, de grands parents, d’oncle ou tante, neveu ou nièce, d’ami(e). Rôles que nous jouons plus ou moins bien en fonction de notre histoire, de nos modèles, de nos expériences réussies ou non. Et ce n’est là que quelques exemples !
Ceci explique en tous cas le fait que non seulement il y a en chacun de nous une multitude de personnages intérieurs, mais nous permet de comprendre aussi nos difficultés de communication interpersonnelle. Lorsque nous discutons avec une personne, nous ne sommes pas deux. Ce sont véritablement deux troupes théâtrales qui se font face et essaient d’entrer en relation ; chacun de nos acteurs intérieurs se battant pour prendre le devant de la scène et diriger la situation. Autrement dit, faute d’un metteur scène pour diriger la pièce de théâtre qu’est notre vie, c’est la cacophonie ! Nous ne comprenons plus rien, nous sommes perdus dans cette histoire de vie qui se joue. Nous sommes alors victimes inconscientes de nous même, nous projetons alors sur « les autres » nos propres manques et difficultés et les en rendons responsables !
Le remède ? Comme dans un orchestre, pour jouer une symphonie il faut une partition qui permette à chaque instrument de musique d’avoir sa place en respectant celle des autres, et un chef qui fasse respecter la partition. Il ne s’agit pas non plus de la « jouer perso » ! Ceux qui se sentiraient délaissés ou ignorés, risqueraient fort de se rebeller et de faire quelques fausses notes pour se faire remarquer !
Extrait : Hal et Sidra STONE- Le Dialogue Intérieur- Connaître et intégrer nos sous-personnalités – Editions Souffle d’Or – Collection Chrysalide – 1991
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