Alexander Lauterwasser habite Heiligenberg près du lac de Constance. Il a consacré une grande partie de sa vie à l’étude de la relation entre vibrations et formes. « Le son est créateur de la forme » nous dit-il. « Au commencement était le Verbe… ». Voici la maxime que son DVD illustre en images et en musique. Un document émouvant tant par sa portée scientifique que par ses qualités esthétiques.
Ernst Flory Chladni à l’origine de son travail.
Tout a commencé lorsqu’il avait 12 ans. Alexander Lauterwasser a trouvé une tortue en forêt. Il s’y est consacré pendant des années. Il en a élevé. Il doit y en avoir entre 80 et 100 dans son jardin aujourd’hui. Un beau jour, il a découvert les figures de Chladni, un chercheur contemporain de Goethe. En frottant avec un archet des plaques de métal saupoudrées de sable, celui-ci obtenait des structures magnifiques, similaires à des formes de la nature et entre autres à la carapace de tortue.
Intrigué par les résultats de formes si proches de formes naturelles existantes, Alexander L. cherche des appareils pour reproduire ces figures vibratoires.
Avec les figures sonores de Chladni, là où les surfaces sont noires, la vibration de la plaque est si forte que le sable y est balayé. La surface est déformée, un peu comme une tôle ondulée. Les lignes claires, comme nous l’enseignent les physiciens, sont des zones de maillage où règne le calme, et où le sable peut se concentrer et rester. La loi régissant ce phénomène est très fortement liée à la fréquence propre de la plaque, à l’instar des poêles dont chacune a sa propre sonorité. De la même façon, chaque plaque a sa propre vibration. Les tons bas donnent peu de structures étendues. Plus les fréquences montent haut, plus les formes sont complexes.
Recherche technique personnelle
Avec l’aide du spécialiste en haut-parleurs, M. Lua , Alexander L, a réalisé un générateur de vibrations et de fréquences, capable de les transmettre directement à une plaque. Cette plaque d’acier ou de laiton ultra fine est accouplée directement à ce transformateur de sons. Elle doit être parfaitement horizontale, ce qui peut être réglé avec un niveau à bulle, et lorsque tout est prêt, on la saupoudre uniformément de sable tamisé très fin, du sable de Heiligenberg par exemple, pour un rendu maximum. L’expérience est filmée avec une caméra vidéo.
Lorsque l’on soumet une plaque à une fréquence allant de 200 à 20 000 Hz, il se forme des structures très particulières et très nettes, jusqu’à 200 différentes dans une plage de fréquence. Ceci témoigne de certaines lois bien particulières, en l’occurrence la répétition de formes et motifs. Ces formes sont très facilement reproductibles sur les corps solides, si l’on emploi les mêmes matériaux, les mêmes épaisseurs, les mêmes vernis dans un environnement où le climat est identique à + ou -5°C, on obtient, à des variations minimes près, les mêmes images aux mêmes fréquences.
Similitude avec les formes de la nature, la carapace de tortue
A. Lauterwasser a commencé à découper des plaques métalliques elliptiques et à les soumettre à des fréquences. Les éléments de base formant la structure de la carapace de tortue apparaissaient à certaines fréquences bien précises sur ces plaques elliptiques en vibration. Il obtient une couronne de 24 champs périphériques avec une articulation intérieure très marquée, ainsi qu’une structure correspondant à la colonne vertébrale de la tortue. Mais il fut vraiment surpris par la ressemblance exacte, entre les formes de base de la nature et celles qui apparaissent sous forme de vibrations. La forme d’un animal, son aspect extérieur est une propriété fondamentale du vivant, de telle sorte que l’on devrait plutôt voir et comprendre son apparence comme une composition. Le Docteur jenny a dit, de belle façon, que l’animal est une réflexion qui, par son aspect extérieur, nous montre quelque chose du monde intérieur.
Application des figures de Chladni à l’eau
En poursuivant ses recherches, A.Lauterwasser est tombé sur les travaux du Dr Hans Jenny. Actif dans les années 60 en Suisse, celui-ci a appliqué les travaux de Chladni, à des supports liquides. Après une étude intensive des figures sonores de Chladni, A.L tente de nombreuses expériences avec l’eau, le plus universel des résonateurs, dans sa capacité à réagir aux sons, aux vibrations, à différentes fréquences et même à la musique. Comme disait Novalis, « l’eau, c’est le chaos sensible », donc extrêmement ouvert et réceptif à toutes les influences, aux vibrations en particulier. Il conçoit des récipients spéciaux couplés à un transformateur de sons, pour que les vibrations puissent être transmises directement, sans perte, à l’au. La sensibilité de l’eau implique précision et équilibre. Une coupelle d’eau distillée est remplie et mise d’aplomb. La moindre inégalité conduit à une répartition irrégulière de l’eau, ce qui perturbe aussitôt la clarté des images. L’épaisseur de la couche d’au joue un rôle très particulier, on doit développer beaucoup de doigté, pour déterminer quelle est l’épaisseur d’eau optimale selon le type d’expérience que l’on veut faire. le même système de caméra permet de filmer l’expérience. La loi fondamentale régissant les figures sonores de Chladni s’applique très similairement aux images sonores d’eau. A savoir que les sons bas provoquent des structures d’ondulations plus étendues, avec un son sinusoïdal unique donnant un motif ondulant large. En changeant la hauteur du son, il se densifie en conséquence.
Cela fait partie d’un principe tout à fait fondamental de l’eau, qui implique qu’à un endroit de l’espace, différents mouvements et impulsions peuvent se superposer et s’interpénétrer. De cette façon, il est possible que des structures et schémas très complexes puissent se former.
« Rilke a dit, lorsque les premiers microsillons sont apparus, gravés sur un rouleau de cire, en voyant les traces d’un son : « Mon Dieu, ne devrait-on pas retranscrire pour ainsi dire toutes ces structures dans la nature, en sons et quel bruit originel retentirait alors partout dans le monde… «
Quelques exemples d’ondes comparées à des végétaux
Ces images sont révélatrices du principe de fonctionnement de « l’onde statique ». Le physicien l’appelle justement ainsi parce que, bien que tout le système soit en vibration et se meuve continuellement, l’ordonnancement de la structure dans l’espace présente une image visuelle stable. Nous remarquons deux types d’ondes de base, une radiale, linéaire, passant par le centre, et une annulaire émanant du centre vers la périphérie et y retournant.
Toutes ces figures, ces images sonores d’eau se forment à partir d’une superposition de ces structures radiales et annulaires. Dans tous ces phénomènes apparaissent des schémas vibratoires dont la parenté avec des schémas et des structures trouvées dans la nature surprend et ne finit pas d’étonner.
A.Lauterwasser a commencé cette recherche de façon fondamentale dans les années 88-89. il a rassemblé environ 10 000 clichés, dispos ou négatifs et plus de 200 heures e vidéo. Ces films l’ont entraîné dans une recherche approfondie de la pénétration de la musique dans l’eau, et à l’observation des formes de mouvements dans les structures sonores complexes. Après des années de travail intensif, il a eu le sentiment que ce travail était suffisamment avancé pour être montré. Il se déplace pour de nombreuses conférences avec de nombreux appareils. Il participe depuis trois ans au symposium de l’eau de Lucerne.
L’onde, phénomène originel de création.
La belle représentation indienne antique de Shiva Nataraja, montre la représentation de la marche du monde telle la danse d’un Dieu. La vibration est dans tout, tout est rythme, tout est musique. Il tient un petit tambour. Le mythe dit que ce sont les vibrations de ce tambour qui ont déclenché les premières vagues sur l’océan primordial, l’Okeanos, puisqu-là absolument calme. C’est pourquoi on pourrait dire que l’onde est le phénomène originel par excellence de tous les phénomènes vibratoires et de création. Si nous examinons notre propre culture, nous avons ici sur cette gravure sur bois de la fin du moyen-âge une très belle représentation de l’idée de la Genèse ; Et Dieu parla, ou comme au début e l’évangile de Jean, « Au commencement était le Verbe ». Nous voyons tout autour la plus grande sphère, le Ciel, les anges, les étoiles et Dieu. Et puis, ce qui est capital dans notre sujet, un grand cercle, l’okéanos des anciens Grecs, le liquide primordial dont notre H2O n’est plus, d’une certaine façon, qu’un écho. Ce fluide représente exactement cette dimension, ce champ de force qui fait le lien entre ce spirituel originel, ce cosmique périphérique et le processus de formation, de matérialisation du monde, qui ici se densifie, s’accomplit au centre, puis nous pouvons aisément le constater. ( Image Sur CLE : SHIVA ET SON)
L’exemple de la goutte d’eau
Décrivons un autre exemple, lorsque l’on met une goutte d’eau isolée en oscillation. Prenons une goutte d’eau, telle qu’on la trouve sur un pétale ou bien une goutte de rosée. Nous voyons, au départ, un mouvement très simple de montée et de descente, Goethe aurait parlé de phénomène premier, le plus simple. Le premier phénomène de formation se manifeste par un bombage et un affaissement. Le bord reste encore parfaitement rond, mais nous avons déjà un processus polaire. Nous voyons qu’il s’est formé au centre, dans le liquide, une petite bulle d’air qui nous montre à nouveau que la substance de l’eau à l’intérieur décrit un mouvement d’écoulement et de circulation complètement différent du mouvement plastique à l’extérieur.
Si nous augmentons maintenant légèrement la quantité d’eau, disons 2 – 3 – 4 gouttes, ainsi que la fréquence, il se passe un phénomène identifié par Chladni : les structures deviennent multi-cellulaires. Nous n’avons pas seulement 3-4 dômes, mais 5n10 et plus, avec des articulations intérieures. Nous n’avons donc pas simplement un cercle à l’extérieur, et un dôme au milieu, mais des cercles intermédiaires. Ceci constitue, comme je viens de le dire, une loi tout à fait générale. Si nous coupons le son, nous retrouvons la goutte telle qu’elle était au départ, parfaitement ronde. L’eau est ici quelque peu épaissie avec de la glycérine, et nous constatons très nettement qu’il se forme au centre une structure quasi cristalline. Ceci est un processus vraiment prépondérant : le degré de la fluidité de l’eau dans notre monde a un rapport avec la forme des êtres vivant,s leurs corps, leurs organes, qu’il s’agisse de plantes, d’animaux ou de l’homme.
Tenter de comprendre le monde autrement
Observons un cas très spécial, dans une plage de fréquence bien particulière, autour des 11 388 Hz. Nous avons un phénomène particulier : la plaque vibre « en elle-même ». Elle flotte de façon spéciale, ce qui donne de petites zones sur l’ensemble de la plaque où le sable ne se rassemble pas « au calme » le long de lignes, mais où il commence à tourner, à virevolter. Nous voyons très bien, comment différents tourbillons dextrogyres et lévogyres se croisent et s’interpénètrent. Avec cette expérience se dégage une loi fondamentale. La forme ne se crée pas de façon additive à partir des différentes parties, mais c’est au contraire le mouvement qui leur donne leur positon dans l’ensemble. Donc, la forme n’est pas issue d’une addition de petites briques atomiques, mais d’un tout da s lequel les parties s’incorporent et d’où naît la forme.
A.Lauterwasser pense que le temps est venu de rassembler et d’intégrer les différents courants dissociés de l’art, des sciences naturelles et de la philosophie. Ces différentes façons de comprendre le monde, peuvent s’enrichir les unes les autres afin d’accéder à une compréhension plus profonde. Lorsque l’on observe attentivement la nature, on découvre partout les traces et les signatures de vibrations et de rythmes. Chaque bord de feuille a son propre code, son propre rythme, dans sa dentelure, on peut le voir sur le pissenlits et dans beaucoup d’autres cas. C’est le cas par exemple dans les sutures osseuses de notre crâne.
Grâce à Alexander Lauterwasser, la maxime de la Bible, « Au commencement était le Verbe » se trouve ainsi parfaitement illustrée sous nos yeux et nous le remercions pour ce document où se rejoignent science et métaphysique.
DVD « RESONANCE ET CREATION« images sonores d’au d’Alexander Lauterwaser – Les expériences sont filmées en temps réel. La forme apparaît sous nos yeux ! 70 mn doublé en français – en vente dans la boutique du site Alexander Lauterwasser : http://www.wasserklangbilder.de/