TOUTES QUETES MENENT-ELLES A L’EVEIL

Posté par othoharmonie le 18 novembre 2014

 

301801_351409564914517_100001364302666_906493_250051953_nLa plupart des épopées spirituelles s’achèvent sur l’illumination ou l’éveil. Mais que se passe-t-il ensuite ? A quoi ressemble la vie après l’extase ? Une mort peut-elle nous inviter à renaître ? Extrait du livre de Jack Kornfield, Après l’extase, la lessive.

Dans de nombreux récits initiatiques, la recherche de ce qui est au-delà de la mort est décrite comme un héros traversant les grandes eaux, escaladant l’inaccessible montagne, affrontant les dragons ou faisant face aux armées de Mara qui personnifie les forces du mal. Dans chacune de ces images, il faut risquer la vie que nous avons connue pour découvrir quelque chose de nouveau.

Peut-être ces comparaisons nous impressionnent-elles : le territoire inconnu de l’initiation ne s’ouvrira à nous que dans la mesure où nous tournons tout notre être courageusement vers lui. En affrontant l’inconnu de notre plein gré, nous accordons notre confiance à une raison de vivre plus large. Puis nous devons nous aventurer là où la route nous conduit, quel que soit l’endroit, malgré l’obscurité, malgré les palpitations de notre cœur.

Faire résolument face à l’inconnu nécessite le soutien de la pratique ou du rituel auquel nous nous sommes confiés. Pour Nachiketa, cette aide résulta de sa constante méditation et de son assise immobile trois jours trois nuits durant. pour d’autres ce sera une prière ininterrompue au milieu des crises ou un rituel initiatique traditionnel conduit par des Aînés. L’intensité de l’aspiration et de la résolution à nous diriger vers l’inconnu va nous conduire au royaume du seigneur Yama.

La rencontre avec la mort peut prendre de nombreuses formes. A l’image des forêts lointaines dans lesquelles pénétra Nachiketa, les monastères thaïlandais où je fis mon apprentissage de moine bouddhiste étaient à dessein situés dans des régions réputées pour leurs animaux sauvages, leurs grottes obscures et leurs fantômes. L’entraînement incluait le fait de s’assoir seul toute la nuit, de méditer dans des lieux de crémation dans la forêt, de rester auprès des cadavres qui avaient été brûlés jusqu’à ce que le feu s’éteigne à l’aube.
Dans le déroulement naturel de nos vies quotidiennes, la maladie ou la naissance d’un enfant peut nous amener à rencontrer la mort et modifier ainsi le cours de notre vie. lorsque ma femme accoucha de notre fille Caroline, cela dura trois nuits et trois jours comme l’épreuve de Nachiketa. Nous respirions ensemble, nous nous tenions la main et attendions. Peu à peu, au fil des heures, elle devint de plus en plus épuisée et résignée, jusqu’à ce que la dernière phase intense de l’accouchement lui ouvre le monde de la maternité.

Dans une initiation, donnons naissance à nous-mêmes. Une nonne du bouddhisme tibétain d’origine anglaise, qui passa douze ans de retraite dans des grottes himalayennes, raconte comment elle dut s’en remettre à sa pratique spirituelle pour rester en vie le jour où une énorme avalanche recouvrit sa grotte et la vallée, tuant de nombreuse personnes. Après avoir creusé un trou pour l’air, elle médita des jours et des nuits dans une longue obscurité hivernale.

Chaque initiation nous propose une épreuve dans laquelle il nous est demandé d’abandonner ce qui est ancien et de nous ouvrir à une plus large vision. Parfois l’initiation se déroule en privé mais, dans d’autres cas, elle peut nous demander de prendre part à un rituel collectif de transformation et d’accomplir un acte public courageux. Pendant les mouvements en faveur de la démocratie dans les années 70 en Thaïlande, les étudiants et la police militaire se battirent des jours entiers dans les rues de Bangkok, à coups de pierres, faisant des centaines de morts et de blessés parmi les étudiants. Un matin, après une journée sanglante la veille, un maître de méditation de Bangkok rassembla ses moines et ses nonnes et leur dit qu’il était temps de mettre à l’épreuve ce qu’ils avaient développé. Puis prenant la tête de cette centaine de personne en robe avec leur bol d’aumône, il les mena en file indienne vers le conflit. Ils avancèrent dans le no man’s land entre les barricades. Les fusils s’abaissèrent et les tensions diminuèrent tandis qu’ils restaient là, hommes et femmes en robe pour la paix, rappelant à tous ceux qui étaient présents une autre possibilité. Ce matin-là, le processus graduel de réconciliation commença véritablement.

Après l’extase, la lessive…, Jack kornfield
Pocket (Novembre 2010) 

 

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