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La rationalité de la foi

Posté par othoharmonie le 4 décembre 2014

 

Depuis le début de ce que les schémas historiques appellent l’époque moderne (XVIIè siècle), nous avons pris l’habitude de séparer rigoureusement l’attitude scientifique de l’attitude religieuse, et même de les opposer en les considérant parfaitement incompatibles. Beaucoup de gens s’offusquent par exemple en entendant un scientifique avouer sa foi, jusqu’à remettre en question son professionnalisme et ses compétences de chercheur justement, estimant que science et religion ne peuvent raisonnablement cohabiter. 

OLYMPUS DIGITAL CAMERACe qui m’intéresse ici, c’est d’examiner rapidement les sources de ce conflit, et la manière dont on renvoie face à face ces deux perspectives que sont l’attitude scientifique et l’attitude spirituelle. Mais ce que j’aimerais surtout montrer, en m’appuyant précisément sur des recherches scientifiques et mathématiques notamment, c’est que l’acte de foi peut être considéré comme tout à fait rationnel, voire logiquement incontestable, ce qui peut même, à l’extrême, nous conduire à désigner une attitude athée comme allant à l’encontre de toute logique rationnelle.

Bien sûr, je n’irai pas jusqu’à défendre cette position, car j’estime que même si l’attitude consistant à opposer foi et raison est en même temps infondée et indéfendable sur un plan purement logique, le fait d’établir une rationalité d’ordre scientifique à l’acte de foi n’autorise pas à faire preuve du même type d’obscurantisme dans le sens opposé. Au contraire de la position agnostique (ne pas se prononcer sur l’existence de Dieu), l’athéisme, en tant que conviction en la non-existence d’un Dieu, relève pleinement d’un acte de foi, puisque parfaitement indémontrable, et n’a pas non plus en ce sens à se légitimer dans la mesure où cette croyance doit relever d’une conscience purement individuelle et intime. 

LES SOURCES D’UNE OPPOSITION

A priori, ce qui caractérise l’opposition entre science et religion, dans la conscience commune, c’est une sorte de face à face binaire entre deux schémas à la fois erronés et très restrictifs : d’un côté la science, associée à la raison, la logique, la vérité, l’objectif, et de l’autre la religion, assimilée à la croyance, l’imaginaire, l’incertitude et le subjectif. Présenté comme ça, on se rend bien compte que cet oxymore science/religion est à la fois incomplet, artificiel, voire intenable, mais c’est pourtant ce qui semble animer au quotidien le débat entre « purs scientifiques » et « purs croyants ». Il est d’ailleurs dommageable que les uns et les autres s’excluent mutuellement ainsi, mais le nerf de la guerre et les arguments avancés par chaque camp sont plus ou moins redondants : d’un côté les scientifiques vont se parer d’un savoir complètement rationnel, logique et par là même irréfutable, ne supportant aucune objection puisque parfaitement objectif. A l’opposé, les religieux vont utiliser au fond le même argument, mais à l’appui d’un relativisme absolu qui va consister à soutenir que leurs propos relèvent de la foi, que chacun est seul maître de sa propre croyance, et qu’en ce sens aucun énoncé ne peut la réfuter. 

Vous l’aurez compris, ces deux postures me paraissent aussi extrêmes l’une que l’autre, mais surtout bêtement restrictives. Je ne suis pas convaincu par exemple que la science soit toujours rationnelle, et il est avéré que ses énoncés n’ont qu’une durée de vie limitée, de la même manière que je suis tout à fait persuadé que l’on peut trouver des arguments rationnels tout à fait solides en faveur de la foi. Ce sont ces deux aspects que je voudrais creuser à présent. 

RELATIVITÉ DE LA SCIENCE ET RATIONALITÉ DE LA FOI 

La première des choses qu’il faudrait vraiment remettre en question, c’est ce caractère à la fois rationnel, immuable, universel et parfaitement incontestable des « vérités » scientifiques. Pour commencer, la science repose davantage sur une attitude empirique (expérimentale) que véritablement rationnelle. Les énoncés scientifiques sont « démontrés » a posteriori, mais au départ de chacun de ces énoncés, il n’y a rien de plus qu’une hypothèse, une opinion, une intuition même. On part donc d’une idée complètement subjective que l’on va chercher à démontrer scientifiquement pour voir si cela fonctionne ou pas. Il faut noter également que la « preuve » de ces énoncés scientifiques n’est valable qu’au sein de ce qu’on appelle le « paradigme » scientifique, c’est-à-dire au sein de ce schéma. Par exemple, un théorème mathématique ne peut être prouvé que via les mathématiques. Sortez du cadre mathématique, vous aurez beaucoup de mal à montrer que la somme des angles d’un triangle est toujours égale à 180°, ce qui remet sérieusement en question le caractère universel de ce type d’énoncé. 

En second lieu, et par-delà le fait que la science s’auto- valide au fond elle-même, en ayant beaucoup de mal à sortir de son paradigme, il faut également considérer que ce qui caractérise un énoncé scientifique, c’est sa faible durée de vie. Là, soyons clair, je n’énonce pas une théorie personnelle, cette idée est communément admise en épistémologie depuis que Karl Popper a établi, comme critère de scientificité, la possibilité d’invalidation d’un énoncé. En clair, un énoncé ne peut être considéré comme scientifique s’il ne peut être réfuté. Pour reprendre l’exemple précédent, ce qui a permis de considérer comme scientifique le fait que la somme des angles d’un triangle soit toujours égale à 180°, c’est le fait que cet énoncé  puisse être invalidé par la suite, ce qui n’a pas manqué d’arriver, et à deux reprises (on sait aujourd’hui que la somme des angles d’un triangle peut aussi être supérieure ou inférieure à 180°). Dès lors qu’on a cela en vue, on a donc beaucoup de mal à considérer les énoncés scientifiques comme des vérités à la fois universelles et immuables. Pour les scientifiques eux-mêmes, de telles vérités relèvent du domaine de la mystique, la science étant caractérisée par la caducité de ses propositions. 

Envisagé comme ça, on peut donc considérer que le domaine des « vérités immobiles » relève de la croyance, en ce sens qu’elles sont parfaitement subjectives, mais ça n’est pas ce qui m’intéresse ici. Je ne vais pas non plus m’attarder sur des arguments purement spéculatifs et relevants plus ou moins du jeu d’esprit comme le fameux pari de Pascal (cf Pascal, Les Pensées, fragment 233 de l’édition Brunschvicg). Ce qui m’intéresse, c’est de montrer que la foi en un dieu par exemple peut être considérée comme tout à fait rationnelle, voire davantage en adéquation avec la logique que la position athée (qui au fond, je l’ai dit, relève elle aussi de l’acte de foi). Pour cela, je m’appuierai essentiellement sur l’idée que l’univers est né d’un hasardeux concours de circonstances plutôt que d’une « cause première », c’est-à-dire d’une certaine forme d’agencement ordonné, pour montrer que la première position est beaucoup moins défendable sur le plan logique que la seconde. 

Je serai volontairement assez bref, car je vais exposer ici une idée qui n’est pas de moi, et qui est expliquée de manière très complète dans un ouvrage écrit conjointement par Jean Guitton, philosophe chrétien réputé pour son sérieux et son érudition, et Grishka et Igor Bogdvanov, physiciens et astrophysiciens qui ont malheureusement, malgré leurs compétences certaines, beaucoup soufferts de leur surexposition médiatique. Pour ceux que ça intéresse je vous renvoie donc à l’ouvrage : Dieu et la science, Editions Grasset et Fasquelle, Paris, 1991. 

Très rapidement donc, l’idée défendue dans l’un des chapitres est la suivante : la naissance de l’univers, et a fortiori l’éclosion de la vie, résultent d’une foule de combinaisons et de facteurs et, si le plus infime d’entre eux avait été légèrement modifié, n’auraient jamais pu voir le jour, ce qui remet fortement en question le fait que ces combinaisons aient eu lieu au hasard. Je cite un passage, ce sera plus clair : 

« Il est vrai que le calcul des probabilités plaide en faveur d’un univers ordonné, minutieusement réglé, dont l’existence ne peut être engendrée par le hasard. Certes, les mathématiciens ne nous ont pas encore raconté toute l’histoire du hasard : ils ignorent même ce que c’est. Mais ils ont pu procéder à certaines expériences grâce à des ordinateurs générateurs de nombres aléatoires. A partir d’une règle dérivée des solutions numériques aux équations algébriques, on a programmé des machines à produire du hasard. Ici, les lois de probabilité indiquent que ces ordinateurs devraient calculer pendant des milliards de milliards de milliards d’années, c’est-à-dire pendant une durée quasiment infinie, avant qu’une combinaison de nombres comparable à ceux qui ont permis l’éclosion de l’univers et de la vie puisse apparaître. Autrement dit, la probabilité mathématique pour que l’univers ait été engendré par le hasard est pratiquement nulle. » 

L’extrait est limpide, il n’y a pas grand-chose à ajouter, mais on voit bien que d’un point de vue purement mathématique, statistique et logique, il est beaucoup plus rationnel de soutenir que l’univers, et la vie, ont été créés à l’initiative d’une forme de conscience extérieure, ou du moins d’un ordre naturel réglé, que par le fruit du hasard via une accumulation de coïncidences fortuites. 

UNE OPPOSITION RENVERSÉE ?

OLYMPUS DIGITAL CAMERACe que l’on peut tirer des observations que l’on a examinées jusqu’à présent, c’est que le schéma simpliste consistant à associer la science à la raison, à l’universalité et à l’objectivité, en l’opposant au subjectif et au relatif de la foi n’est pas aussi évident que ce qui paraît au premier abord. 

En voulant caricaturer le débat dans l’autre sens, et en étant un peu provocateurs, on pourrait même dire que la science repose finalement sur beaucoup moins de certitudes que la religion. D’une part car, on l’a vu, la posture scientifique se fonde sur une démarche empirique et elle se construit de manière perpétuelle en détruisant ce qu’elle a énoncé précédemment, là où la religion a de son côté une fâcheuse tendance à ne jamais vouloir remettre en question ses énoncés. Mais de manière plus intéressante, on a même pu envisager le fait que l’avènement du monde et de la vie n’avait quasiment aucune chance, en matière de probabilités, de reposer sur le hasard, ce qui plaide au minimum, de manière presque scientifique, pour une conception ordonnée et réglée de l’univers, voire pour une impulsion extérieure à sa source. 

Sans vouloir remuer trop de vase et rentrer dans des provocations inutiles, tout ceci peut au moins, je l’espère, permettre à chacun, scientifiques et religieux, de se montrer un peu moins dogmatiques en ce qui concerne leurs positions respectives. Une telle attitude pourrait permettre de dépasser cette ambivalence un peu frustrante, et pourquoi pas, de penser conjointement le monde selon ces deux modèles qui n’ont rien d’antagonistes, comme les auteurs de l’ouvrage que j’ai cité plus haut ont tenté de le faire. 

QUELQUES DOUTES DE PLUS POUR TERMINER…

Pour terminer, j’aimerais insister sur le fait qu’il ne s’agissait surtout pas ici, à mes yeux, de faire l’apologie de la religion en dénigrant la posture scientifique. Je voulais simplement proposer une alternative au schéma un peu trop restrictif qui a malheureusement pignon sur rue, en montrant que la foi pouvait aussi avoir des fondements tout à fait rationnels, de la même manière que la science pouvait également être construite sur beaucoup d’incertitudes, de tâtonnements et d’hésitations. 

Mais surtout, je trouve dommage de vouloir aujourd’hui bâtir un monde que l’on s’imagine parfaitement systémique, sur des vérités périssables par essence, en se berçant d’une illusion qui relève elle aussi, au fond, de quelque chose de très mystique. Mais histoire de jeter encore un peu plus de doutes dans la marmite, si l’on considère l’acte de foi comme rationnel, peut-on encore, au final, appeler ça de la foi ? C’est un autre débat en tout  cas…

par Shaël Texte issu du Mag des Païens d’Aujourd’hui

Publié dans En 2012-2013 et après 2016, LECTURES Inspirantes, Philosophie de la VIE, SPIRITUALITE c'est quoi ? | Pas de Commentaire »

Travail rituel avec le Centre

Posté par othoharmonie le 4 décembre 2014

 

par B. T. Newberg, traduit par Boadicée et Siannan 

Mon dernier rituel de Samhain1 expérimentait une nouvelle technique pour créer un moment et un espace spécial (par exemple l’espace sacré) : travailler avec le centre. En résumé, les  participants circumambulent autour d’un point focal. Cela parait assez simple, n’est-ce pas ?

Maintenant, approfondissons un peu. Pourquoi créer un espace et un temps spéciaux ? Pourquoi proposer de nouvelles techniques ? Qu’est-ce que le centre ?

 

htableau1_01POURQUOI CRÉER UN ESPACE ET UN TEMPS SACRÉ ? 

Le but ultime du rituel est de réaffirmer ou de modifier les schémas de perception et de comportement. A cette fin, il est utile de créer le sentiment d’un espace et d’un temps sacrés. Quelle que soit la nature du temps et de l’espace dans l’absolu, notre expérience d’eux est malléable. Le temps peut sembler plus long ou plus court, l’espace peut sembler plus vaste ou plus vital, et les deux peuvent atteindre une signification plus élevée, dépendant de votre niveau de conscience. Le temps et l’espace peuvent parfois apparaître spéciaux. Dans ces moments, les schémas comportementaux habituels sont interrompus lorsque l’inconscient réévalue la situation. Ce sont donc ainsi des instants privilégiés pour introduire de nouvelles informations dans le système. En bref, la fonction d’atteindre le sens d’un temps et d’un espace spéciaux est de signaler à l’inconscient que ce qui va arriver est significatif, de façon à ce qu’il le privilégie désormais dans la mémoire et le processus décisionnel. 

Théologiquement parlant, il s’agit de créer un espace qui est sacré, ce qui veut dire «distinct». L’espace et le temps rituel sont distincts car spéciaux et significatifs.

 

POURQUOI CRÉER UN ESPACE ET UN TEMPS SACRÉ ? 

Le but ultime du rituel est de réaffirmer ou de modifier les schémas de perception et de comportement. A cette fin, il est utile de créer le sentiment d’un espace et d’un temps sacrés. Quelle que soit la nature du temps et de l’espace dans l’absolu, notre expérience d’eux est malléable. 

Le temps peut sembler plus long ou plus court, l’espace peut sembler plus vaste ou plus vital, et les deux peuvent atteindre une signification plus élevée, dépendant de votre niveau de conscience. Le temps et l’espace peuvent parfois apparaître spéciaux. Dans ces moments, les schémas comportementaux habituels sont interrompus lorsque l’inconscient réévalue la situation. Ce sont donc ainsi des instants privilégiés pour introduire de nouvelles informations dans le système. En bref, la fonction d’atteindre le sens d’un temps et d’un espace spéciaux est de signaler à l’inconscient que ce qui va arriver est significatif,  de façon à ce qu’il le privilégie désormais dans la mémoire et le processus décisionnel. 

Théologiquement parlant, il s’agit de créer un espace qui est sacré, ce qui veut dire «distinct». L’espace et le temps rituel sont distincts car spéciaux et significatifs.

 

POURQUOI UNE NOUVELLE  TECHNIQUE ? 

Mais attendez ! quel est l’intérêt d’expérimenter de nouvelles méthodes pour ce faire ? Ne sommes nous pas en train de réinventer la roue ? Il y a déjà plusieurs techniques éprouvées pour créer un espace sacré dans la communauté païenne, telles que tracer un cercle ou ouvrir les portails. Elles évoquent habituellement une sorte de déplacement entre «les mondes», et les naturalistes peuvent facilement comprendre cela comme se mouvoir entre différents états de conscience. Les naturalistes gagnent à se familiariser avec ces techniques, car cela nous permet de prendre part à des rituels dans différentes traditions, côte à côte avec d’autres païens dans une communauté plus large. Et si ça fonctionne avec vous, hé pourquoi donc ne pas l’utiliser ! 

En même temps, ces techniques peuvent laisser à désirer. Leurs supports théoriques sont hautement métaphysiques. Par exemple, le but d’un cercle est prétendument de maintenir les énergies hostiles à l’extérieur ou celles désirées à l’intérieur. L’ouverture des portails (une technique de l’ADF2 et de ses ramifications) est destinée à accroître la communication avec les divinités, les esprits et les ancêtres. Bien que cette théorie ne doive pas empiéter sur la pratique, elle me laisse m’interroger sur ce que ce serait que d’expérimenter une technique entièrement naturaliste, faite maison et inspirée par les motifs de la nature. Par conséquent je vous présente : le centre.

images (4)QU’EST-CE QU’UN CENTRE ?

Où que vous regardiez, les centres (avec un petit «c ») imprègnent la nature. Ce sont des centres au sens littéraire, tel le noyau atomique entouré par ses électrons ou l’étoile par ses planètes. Il y a aussi des centres au sens figuré comme le trou d’eau entourée par des troupeaux ou le séquoia géant par un mini- écosystème de vie. Sur un plan domestique, il y a le feu du foyer de la maison. Sur un plan cosmique, il y a le point d’origine omnicentrique du Big Bang (qui est partout). Les centres sont partout. Point crucial, le centre n’existe qu’en relation avec ce qui tourne autour. Sans cela, il n’a aucun sens. Les centres sont profondément relationnels. 

Ainsi, la caractéristique qui distingue le centre est que c’est le centre de quelque chose. Il unit ce quelque chose autour d’un objectif partagé. C’est le nexus, la source, ou le coeur d’une communauté. Et c’est ce qui le rend intéressant comme schéma rituel. 

Le Centre (avec un grand « C ») est un langage liturgique pour concentrer de manière réelle et symbolique l’activité rituelle. Il est réel dans la mesure où il est réellement ce sur quoi se concentrent tous les participants, et symbolique dans la mesure où il reproduit les motifs majeurs de la nature. Son rôle dans les rituels est d’altérer la conscience suscitant la relation entre l’ego individuel au groupe et au cosmos. Comme tout bon langage liturgique, le Centre est plus suggestif qu’indicatif, évocatif plus que précis, de sorte que chaque personne puisse s’y retrouver. Pratiquement tout peut être vu comme un centre si l’on regarde d’assez près, et c’est l’intérêt : il est partout, mais il requiert un changement de perspective pour pouvoir être vu.

 

Comment réaliser un rituel avec le Centre ? 

La technique de base est de choisir un point focal approprié, de le marquer comme le Centre, et circumambuler autour en pleine conscience trois fois. Cela peut s’accompagner de gestes, de phrases, et/ ou d’hymnes appropriés (voir le texte du rituel de Samhain pour un exemple). Bien que cette technique soit simple, elle élabore beaucoup de choses.

 

1. LA JUSTESSE

Le choix du point focal devrait être approprié, doublement. Tout d’abord, cela signifie qu’il doit être un vrai centre d’activité réelle, ce qui nécessite une réflexion des participants sur l’écosystème local. En quel sens le point focal est-il un centre ? Est-ce un arbre autour duquel se rassemblent diverses créatures, un puits dont la communauté tire sa subsistance, ou l’étoile polaire autour de laquelle notre perspective terrestre tourne ? 

En même temps, la justesse signifie aussi qu’il doit être adapté aux intentions du rituel. Cela requiert des participants de lier leurs intentions au centre. Par exemple, un rituel pour de nouveaux commencements peut encercler le point de départ d’un chemin, ou un rituel de mort autour d’un champ récemment récolté.

Au cours de la planification d’un rituel, vous pouvez passer des heures, des jours ou même des semaines à apprendre à connaître la région et trouver le lieu parfait. Le fait de penser ainsi au lieu va vous ancrer en lui, faire couler votre inspiration et rendre le rituel plus concret et significatif. De plus, cela commencera à transformer votre perspective ordinaire des objets et intérêts vers une perspective holistique de relations et de symboles. 

2. MARQUER

Quand les rituel est sur le point de commencer, le point focal choisi est marqué comme le Centre. Un corde peut être ceinte autour d’un arbre, une pierre installée dans un champ, un sigil tracé à la craie sur un chemin pavé, et ainsi de suite. Ça peut être élaboré ou spartiate, mais quel que soit le marquage, il ne doit pas éclipser mais plutôt compléter la beauté naturelle du Centre. Cela a des fonctions à la fois pratique et symbolique. D’un point de vue pratique, ça marque clairement pour tous les participants où se trouve exactement le centre. D’un point de vue symbolique, ça confirme votre relation à lui, en y contribuant par une part de vous-même. Cette rencontre entre soi et l’autre établit le lien initié par la considération précautionneuse du lieu le plus adapté. 

3. CIRCUMAMBULATION EN PLEINE CONSCIENCE 

Circumambuler veut dire tourner autour du Centre. Qu’il s’agisse d’une procession solennelle ou d’une danse musicale, c’est à vous de voir. Dans tous les cas elle doit être faite en pleine conscience, trois fois. A la fin du rituel, circumambulez une fois dans le sens inverse pour signifier à votre esprit le retour au temps et à l’espace  normaux. En imagination, laissez ce centre devenir le Centre, symbole de tous les centres dans votre vie, et même de tous les centres de l’univers. Laissez-le devenir un lieu d’interprétations infinies, une source d’où coule l’inspiration comme les motifs et relations se suggèrent elles-mêmes à vous. Laissez toute pensée vagabonde passer sans y prêter attention, ramenant gentiment votre concentration sur le Centre. 

Cela peut être supporté par l’usage de phrases rituelles appelant à songer à des relations spécifiques tandis que vous circumambulez. Par exemple, le texte de Samhain invoque trois relations de la transcendance naturaliste. Au premier tour, les participants lèvent un bras vers le Centre et disent : « Ceci est le Centre, autour duquel tout tourne. Il ne tourne pas autour de moi, je tourne autour de lui. Tandis que je passe j’affirme ma place dans l’esprit.» 

Au second tour, la phrase est répétée, en affirmant «ma place dans la communauté », et enfin, la troisième fois : « ma place dans l’univers ». Traditionnellement, les néopaïens marchent deosil (dans le sens des aiguilles d’une montre) pour créer l’espace sacré. Cela reproduit le mouvement du soleil tel qu’il est vu d’une perspective terrestre dans l’hémisphère nord, où le soleil traverse le ciel du sud. Pour dissoudre l’espace, ils marchent widdershins (en sens inverse des aiguilles d’une montre), ce qui pourrait représenter une nouvelle perspective acquise pendant le rituel. 

COMMENT LE CENTRE FONCTIONNE-T-IL EN PSYCHOLOGIE ? 

Les actes répétitifs symboliques comme ceux-ci peuvent sembler sans intérêt et vides au premier regard pour certains. Toutefois, de récentes recherches dévoilent comment et pourquoi le rituel fait appel au cerveau, de sorte qu’il se retrouve de manière universelle à travers les cultures, que ce soit dans des contextes religieux ou séculiers. Comme expliqué plus loin, le travail avec le Centre tire profit de la connaissance incarnée, de l’association pavlovienne et de la psychologie cognitive pour réaliser un changement de conscience. 

Au niveau le plus primitif, la circumambulation crée ce que l’historien Willian McNeil appelle un « lien musculaire » entre les participants : bouger ensemble dans le temps. Les mouvements synchrones créent l’impression d’un super-organisme, et initie l’immersion de l’ego individuel au sein d’une identité plus vaste. A travers une telle connaissance incarnée, le mouvement du corps façonne la conscience. Au niveau pavlovien, la triple répétition est significative. C’est un nombre dénotant la plénitude dans la culture occidentale, de même que la diversité (la triplicité s’opposant à l’unicité). Ces associations culturelles, instillées en nous depuis notre  enfance, constellent l’état d’esprit désiré selon une association pavlovienne. 

Enfin au niveau cognitif, la pleine conscience monopolise ou « emplit » la mémoire de travail, ne laissant pas de place pour les pensées mondaines ou intrusives, avec pour résultat un état de concentration légèrement altéré.

De plus, le fait que la procédure semble inutile, du moins pour l’observateur non averti, et redondante, encerclant trois fois au lieu d’une, est également important. Lienard et Boyer proposent que l’observation de pas apparemment inutiles signale un danger non apparent à l’inconscient, laissant peut être entendre que la raison des pas doit être une menace potentielle connue des autres mais non de soi. Cela active un module mental qu’ils appellent « le système de risque de danger », qui a probablement évolué pour éviter les dangers mal compris mais mortels, tels que les pathogènes ou parasites. Suivre une coutume d’éviter rituellement les cadavres ou de se laver après avoir touché du sang, par exemple, a des avantages évolutifs, même si l’on ne connaît pas la vraie raison pour laquelle ces gestes doivent être effectués. 

Ce qui nous intéresse ici n’est pas pourquoi le système de risque de danger a évolué, mais comment nous pouvons nous en servir. Son activation éveille un état d’attention particulier, produisant un état de conscience légèrement altéré. Il éloigne l’attention des buts et vers les étapes spécifiques du rituel, qui sont typiquement des actions si automatisées qu’elles deviennent mortes pour la conscience, telle la marche. L’attention supplémentaire donnée à la marche en cercle trois fois réanime cet acte, le rafraîchit, et encourage ainsi une sorte de vivacité et de présence « dans l’instant ». Des signaux rituels, comme les pas inutiles, peuvent déclencher inconsciemment une activation. 

L’état résultant de conscience approfondie peut faciliter significativement le pouvoir émotionnel et le sens d’inspiration d’un rituel. Il est important de noter que ce système est inconscient et intuitif, une partie de ce que Daniel Kahneman appelle Système 1 de pensée. Il y a aussi le Système 2 : la conscience, la pensée délibérée, dont l’effet est souvent d’inhiber des processus intuitifs. Dans ce cas, par exemple, une pensée critique peut questionner la nécessité rationnelle de tourner trois fois, et ainsi inhiber le système de risque de danger et déjouer le  changement de conscience désiré. La question a du mérite, mais nous entrave pour le moment. C’est pourquoi les ritualistes recommandent souvent de mettre de côté tout scepticisme pendant la durée du rituel. Les questions critiques peuvent et devraient être développées avant et après, mais pas pendant le rituel. Ce n’est pas réprimer la critique, mais laisser les systèmes intuitifs fonctionner efficacement. 

Si tout va bien, la technique devrait produire ce que le langage théologique appelle « sacré ».

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VERS UN RITUEL NATURALISTE

Le travail rituel avec le Centre peut être utilisé comme une méthode viable et avec un support scientifique pour créer un espace et un temps sacrés. C’est fait maison selon une perspective naturalise sans exclure qui que ce soit. Il n’est pas non plus lié à une quelconque tradition culturelle, de sorte que les naturalistes spirituels de tous genres pourront le trouver utile. Cette technique en est encore au stade expérimental, aussi sentez-vous libre d’offrir vos commentaire ou vos critiques constructives.

Retrouvez les articles de HumanisticPaganism en anglais sur le site http://humanisticpaganism.com   .

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