L’éveilleur du XXIème siècle
Posté par othoharmonie le 1 janvier 2015
Que la relation disciple/maître doive aujourd’hui s’établir sur des bases autres que celles que la plupart des maîtres ont connues, et ont vécues, n’entre pas dans leur schéma référentiel. De ce fait, ils ne sont pas animés du souci majeur de permettre à leur disciple de s’individualiser et de s’autonomiser. Ne l’étant pas eux-mêmes vis-à-vis de la tradition à laquelle ils se réfèrent, comment pourraient-ils l’envisager pour d’autres ?
Pour qu’ils y parviennent, il leur faudrait se démarquer de la tradition ou de la vérité à laquelle ils consacrent leur existence. Ce n’est qu’à ce prix qu’il leur sera possible de s’ouvrir et de s’harmoniser aux nouveaux courants de forces qui affluent sur le monde. Tant qu’ils n’agiront pas ainsi, ils ne pourront s’élever au niveau de la boucle suivante de la spirale
évolutive.
L’éveilleur moderne
L’enseignant du vingt et unième siècle ne se positionnera plus en gourou. Du reste, il se défera de ce titre pour en adopter un qui sera moins connoté. Il ne jouera plus le rôle de guide au sens où nous l’entendons habituellement. Il deviendra un inspirateur et un focalisateur pour tous ceux qui se trouveront à sa périphérie. À sa périphérie et non plus en son centre. La différence est notable. Le maître d’hier et d’aujourd’hui est un être qui sait, qui voit, qui prévoit ce qui est juste et utile pour son disciple. Le focalisateur de demain amènera son collaborateur à éveiller sa créativité, ses aptitudes et son discernement, à son point de manifestation le plus haut. Son sens psychologique développé et sa connaissance approfondie du potentiel humain lui permettront d’inciter, sans véritablement intervenir, ses collaborateurs à dépasser leurs limites, à s’épanouir en créant et à prendre de plus en plus de responsabilités. En agissant lui-même dans le monde et pour le monde, l’éveilleur moderne sera, pour ses semblables, un modèle. Par son engagement au sein de la société humaine, il les invitera à poser des actes féconds et ce, dans l’optique du bien commun.
Une spiritualité de circonstance
Trop rares encore sont les chercheurs de vérité qui perçoivent le rôle qui leur est dévolu dans le schéma évolutif actuel. La plupart vivent de plus en plus en déphasage avec leur aspiration à incarner une spiritualité vivante dans le monde d’aujourd’hui. Je ne compte plus le nombre de chercheurs de vérité que j’ai rencontrés ces trente dernières années qui vivent en spiritualité au moment de leur méditation journalière et au cours de retraites annuelles. Chercheurs qui, le reste du temps, adoptent des modes de comportement profanes.
Ces êtres scindent leur monde en deux réalités qui se côtoient sans pouvoir se retrouver et fusionner. Ils vivent une spiritualité de circonstance. Il suffirait de peu pour que nombre d’entre eux trouvent leur centre, en manifestent l’essence et prennent conscience de la réalité vibrante spirituelle. La méditation, les retraites, ne sont pas des buts en soi. Elles sont des soufflets de forge qui permettent au disciple d’aviver sa propre flamme intérieure. En l’attisant, il trouve en lui l’énergie nécessaire pour se jeter avec encore plus d’ardeur dans la bataille que se livrent les forces d’inertie (involution) à celles du mouvement (évolution).
Le disciple contemporain
Le mot disciple n’est plus à interpréter dans le sens de dévotion et de soumission à une autorité supérieure. C’était sa définition ancienne. Le disciple actuel est celui qui se trouve en état de tension créatrice, qui se forme pour devenir maître en son domaine et qui, pour y parvenir, s’astreint à une réelle discipline de vie. Le disciple moderne ne fait plus de distinction entre la méditation, les retraites, l’étude et sa participation active et quotidienne dans le monde. Lorsqu’il s’adonne à son activité professionnelle, il médite. Lorsqu’il évolue au sein de son cercle familial, il instaure la dynamique d’une retraite spirituelle. Lorsqu’il s’octroie un temps d’instrospection, c’est pour entrer en relation encore plus profonde avec ses semblables. Le disciple contemporain donne vie aux valeurs du partage, de l’écoute, de l’attention, de l’empathie, de l’oubli de soi, de la responsabilité collective et de l’engagement. Le disciple nouveau oeuvre dans le monde pour réunir, unifier et solidariser. Un disciple apprend à dépasser sans cesse les limites au sein desquelles il ne veut pas et ne peut pas rester enserré. Il n’a pas le choix, sa nature de disciple le pousse à agir ainsi. S’il en allait différemment, il ne serait pas encore devenu disciple et n’éprouverait aucunement la nécessité d’oeuvrer dans un sens altruiste. Un disciple met la puissance de son coeur et la bienveillance de son mental au service de la vie. Il ne fait que donner en mettant sans cesse entre les mains de ses semblables, s’ils le souhaitent ardemment, les matériaux dont ils ont besoin pour que leur quête aboutisse. En imprégnant leur espace d’expression de pensées élevées, de beauté et de sentiments délicats, il stimule leur créativité et leur imaginaire. Qu’aujourd’hui maints chercheurs de vérité souhaitent parcourir le sentier de l’évolution en formation de groupe, et non plus individuellement comme par le passé, est un signe des temps. Participer collectivement à des oeuvres fraternelles, susceptibles d’apporter des changements féconds au sein de la conscience de l’humanité pour l’élever, est un signe évident qui révèle que, de plus en plus, les êtres parcourant le sentier entrent véritablement dans la voie du service. Ce signe annonce une métamorphose collective.
Alain Brêthes*
*Pour en savoir plus, lire :
« Quand le disciple est prêt…
le maître disparaît »,
Éditions Oriane.
Publié dans En 2012-2013 et après 2016 | Pas de Commentaire »