LE ROYAUME DE LA VUE
Posté par othoharmonie le 21 mars 2015
La beauté se trouve dans l’œil de celui qui regarde, dit-on, mais encore faut-il consciemment diriger son attention sur la beauté pour pouvoir l’intégrer. Imaginez une promenade en voiture dans un paysage magnifique. Si on va trop vitre ou si on est trop préoccupé, le paysage défile sans qu’on le remarque ; Il en est de même pour ce qui est de la vie.
Dans ce royaume, on va explorer sa vie grâce au sens de la vue. Vous allez visualiser votre vie pour voir à quoi elle ressemble. Cela signifie que vous allez consciemment diriger vos perceptions vers des informations visuelles. « Regarder simplement le monde alentour est complètement différent de la voir », nous dit l’artiste Frederick Franck.
Pour ceux qui traitent l’information par l’intellect, passer des mots aux images peut être à la fois un choc et un soulagement. La lecture consiste en un traitement actif de l’information, ou plutôt sur « la soif d’apprendre ». Quand on s’approche d’images, on doit apprendre à s’ouvrir à l’information et à la recevoir de façon globale. Nous recueillons des impressions, des intuitions et des sentiments autant que de l’information. L’expérience est multisensorielle, même si elle est aussi intellectuelle ; Ne soyez pas surpris de voir le sceptique en vous résister. Ce personnage aime le « contrôle ». « Une image vaut plus qu’un millier de mots ». Cette banalité peut vraiment devenir une expérience ; On emmagasine différemment l’information, peut-être avec plus de profondeur quand elle nous parvient par le canal visuel. Persévérez, et vous aller élargie votre champ créatif.
Voir c’est croire
Notre vie, c’est l’instrument qui nous sert à expérimenter la vérité, nous dit Thich Nhat Hanh. Ecrire, c’est un moyen d ‘examiner sa réalité. C’est une des façons de l’explorer et de l’exprimer. L’écriture, comme toute forme d’expression, exige que l’on regarde les choses. Mais beaucoup de choses ne peuvent être nommées par des mots et c’est la raison pour laquelle nous agissons plus que nous n’écrivons. Parfois, la lanterne du langage ne suffit pas. Pour voir, nous devons jeter un regard différent sur les choses et utiliser d’autres outils.
Si voir c’est croire, c’est aussi comprendre ; Permettez-moi de vous donner un exemple. J’ai travaillé pendant de nombreuses années avec le matériel de ma petite enfance. Je savais que j’étais une enfant récalcitrante, j’essayais toujours de faire mieux, mieux que mon aîné ; faute de mieux, j’étais la seconde fille, une sorte d’ellipse génétique entre l e premier enfant et le premier fils de mes parents. Pour m’entendre le dire (oui, oui) je portais les vêtements que me venaient de ma sœur, vivais dans l’ombre de la gloire de ma sœur aînée, et j’apportais une lueur bien faible à la lumière des cheveux blonds de mon frère.
En travaillant avec les vieilles photographies de famille et de magazines, j’ai fait un collage de ma vie entre 1 et 5 ans. Au départ, je pensais savoir ce que je recherchais et ce que j’allais découvrir. Je voulais un zèbre, un cheval et un âne – représentant mes trois animaux en peluche, Zeebie, Reddis et Donk-Donk. Je voulais que cet âne réponde à une double tâche ; je faisais aussi un collage des paroles acerbes de ma mère…. Selon ma mère et mon ressentiment bien échauffé, je n’étai spas aussi maniable, aimable et câline qu’est supposé l’être une petit enfant. Oui, en commençant ce collage je savais que ce serait un collage d’horreurs.
Imaginez quelle ne fut pas ma surprise de voir ce que j’ai vu au lieu de voir ce que je recherchais ; Oui, en effet, il y avait la photographie bien connue où je suis recouverte de boue en train de sucer un tuyau d’arrosage comme si c’était un narguilé. Mais ça, qu’est-ce que c’était ? Qui étaient ces deux jeunes amants fragiles qui se regardaient les yeux plein d’espoir ? Les jambes minces de ma mère …, le feutre rond élégant de mon père … cette lueur dans leurs yeux, dans leur sourire partagé au-dessus de la tête de leurs trois petits anges – tous ces détails étaient nouveaux pour moi. Mes parents s’aimaient – de jeunes amants, épris l’un de l’autre, allongeant leurs doigts et leur sourire pour communiquer. Tellement amoureux, tellement occupés, qui des deux aurait eu le temps de tourmenter leur second enfant ? Qui aurait pu présenter cette inclination ?
Si voir c’est croire, c’est aussi comprendre. Mes parents étaient trop jeunes, trop occupés, trop absorbés l’un pour l’autre pour s’adonner à la malice ? Au pire, j’ai souffert d’inattention et non de destruction. En travaillant avec des images sur un collage, c’est souvent la juxtaposition fortuite de nos images disparates qui donne la clé de la conviction que nous portant dans notre coeur.
Les collages ne faisant pas appel au langage, il n’est pas nécessaire d’en extraire des symboles pour les transformer en mots afin qu’ils soient signifiants. Une femme pleine de vie qui se sentait prise au piège dans une relation conjugale éteinte a collé des fleurs, emprisonnées dans des structures urbaines (dans des briques, de spots, du ciment), mais grandement épanouies. Son collage lui a appris à voir que son mariage était mort, mais elle se sentait ben en vie et presque prête à faire des changements.
Nous sommes des êtres humains et non des machines. La vision intérieure peut indiquer la façon de change r, mais souvent être capable de lire les signes est un grand changement en soi. Sans cultiver délibérément la compassion de soi, la croissance spirituelle et créative nécessite la traversée du territoire hostile de ses propres jugements.
Le collage présuppose l’acte de fendre, de déchirer, de déchiqueter, mais il véhicule aussi l’idée de colle, de glu et l’art de rassembler des morceaux. La partie la plus importante du travail de collage est constituée par son objectif : la paix que l’on peut faire avec les parties de soi. Qi quand on se pose une question aussi simple que celle-ci : « Qu’en est-il de mon avenir » ? on se met ensuite à déchirer des images comme s’il s’agissait d’une sorte de lecture informelle, ce peut être un outil très puissant et révélateur….
Extrait de « La veine d’or » de Julia Cameron aux Edition Dangles
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