Spectateur devant le monde
Posté par othoharmonie le 27 novembre 2015
L’évidence immédiate d’un tel principe existentiel l’enracine, par le cœur de sa nature, dans un roc de permanence. Par contraste aussi, elle déploie l’éphémère devant son regard au passage du temps.
Un ferme ancrage préalable dans le socle du réel s’impose à l’homme de science s’il veut entreprendre sous d’heureux auspices l’exploration aventureuse de sa propre structure jusqu’à l’ultime profondeur. Il est souhaitable qu’une amarre indestructible, guidant sa progression dans la descente aux abîmes, lui assure une stabilité à l’épreuve des courants de dérive. Car c’est d’abord dans un monde de fluidité aux formes incertaines qu’il doit passer ; au-delà du territoire où s’élèvent encore les fugitives constructions mentales qui lui sont familières, aucun indice sensible n’apparaît. Un univers sans dimensions d’espace ni de temps se laisse découvrir – paysage de figures significatives que seule une conscience en éveil peut déchiffrer.
Aucun pionnier de cette expédition ne saurait procéder avec l’aide des seules ressources dont dispose l’investigation mentale au-delà des frontières extrêmes de la psyché ; et dès les premiers pas il risque de s’égarer par défaut d’épistémologie. L’achèvement de l’itinéraire exige que soit éveillée la connaissance – à la fois transcendante et immanente de l’intemporel.
Cet éveil à la connaissance de soi – une anamnèse de la vérité au sens platonicien – est-ce là ce que pratiquait Socrate par son art maïeutique ?
On sera tenté de répondre affirmativement après avoir lu les dialogues d’Alcibiade, ceux de Théétète et de Phèdre. Conduire l’interlocuteur à travers les brumes de l’oubli jusqu’à la connaissance de son identité perdue, c’est la tâche du Sage de tous les temps.
(Extrait de Roger Godel – Un compagnon de Socrate. dialogues sur l’expérience libératrice.Édition Les Belles Lettres 1956).
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