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- Je suis p.14 à 26
Extrait de « JE SUIS » – CHAPITRE 1 – page 14
Question : Quel bénéfice tirerai-je de savoir que je ne suis pas ce corps ?
Maharaj : Même dire que vous n’êtes pas le corps n’est pas tout à fait vrai. D’une certaine manière vous êtes tous les corps, les cœurs, les esprits, et bien plus encore. Plongez profondément dans la sensation « je suis » et vous trouverez. Comment retrouvez-vous une chose égarée ou oubliée ? Vous la gardez présente à l’esprit jusqu’à ce qu’elle vienne à vous. La sensation d’être, du « je suis », est la première à émerger. Demandez-vous d’où elle vient, ou contentez-vous de la contempler avec calme. Lorsque le mental se fixe, immobile, sur « je suis » vous entrez dans un état que vous ne pouvez exprimer mais que vous pouvez expérimenter. Tout ce que vous avez à faire, c’est d’essayer sans relâche. Après tout, cette sensation « je suis » vous est toujours présente, mais vous y avez greffé toutes sortes de choses : corps, sentiments, pensées, opinions, possessions intérieures ou extérieures, etc… A cause d’elles, vous vous prenez pour ce que vous n’êtes pas.
Question : Mais alors que suis-je ?
Maharaj : Il vous suffit de savoir ce que vous n’êtes pas. Vous n’avez pas besoin de savoir ce que vous êtes. Car tant que connaissance signifie description en fonction de ce qui est déjà connu, perceptions ou concepts, il ne peut y avoir connaissance soi, car ce que vous êtes ne peut être décrit que comme une négation de tout. Tout ce que vous pouvez dire c’est : » je ne suis pas ceci, je ne suis pas cela », vous ne pouvez raisonnablement dire : « Voilà ce que je suis ». Cela n’a tout simplement aucun sens. Ce que vous pouvez désigner par « ceci » ou « cela » ne peut pas être vous. Pas plus que vous ne pouvez être « quelque chose » d’autre. Vous n’êtes rien d’imaginable. Cependant, sans vous, il ne peut y avoir ni perception ni imagination. Vous observez vote cœur sentir, votre mental penser, votre corps agir ; le fait même de percevoir montre que vous n’êtes pas ce que vous percevez. Peut-il y avoir expérience ou perception sans vous ? Une expérience « doit appartenir à « . Quelqu’un doit venir la réclamer comme sienne. Sans l’expérimentateur l’expérience n’a pas de réalité. C’est l’expérimentateur qui donne sa réalité à l’expérience. De quelle valeur serait pour vous une expérience que vous ne pourriez pas avoir ?
Question : La sensation d’être expérimentateur, la sensation du « je suis », n’est-ce pas aussi une expérience ?
Maharaj : Evidemment toute chose expérimentée est une expérience. Et chaque expérience manifeste son expérimentateur. La mémoire crée l’illusion de la continuité. En réalité chaque expérience a son propre expérimentateur et l’impression d ‘identité est due au facteur commun qui est à la racine de toute relation expérience/expérimentateur. Identité et continuité ne sont pas la même chose. De même que chaque fleur possède sa couleur propre, mais que toutes les couleurs sont causées par la même lumière, des expérimentateur apparaissent dans la conscience pure indivisée et indivisible, séparés dans la mémoire, identiques dans leur essence. Cette essence est la racine, la base, la possibilité intemporelle et non-spatiale pour toute expérience d’apparaître.
Question : Comment puis-je l’atteindre ?
Maharaj : Vous n’avez pas à l’atteindre, vous l’êtes. Cela viendra à vous si vous lui donnez une chance. Débarrassez-vous de votre attachement à l’irréel et le réel prendra sa place rapidement sans heurt. Cessez d’imaginer que vous exister, ou que vous faites ceci ou cela, et vous réaliserez que vous êtes la source et le cœur de tout chose. Il vous viendra alors un grand amour qui ne sera ni un choix, ni une prédilection, ni un attachement, mais un pouvoir qui rend toute chose aimable et digne d’amour.
Extrait du CHAPITRE 2 – page 17
Question : Cependant, vous êtes différent. Votre mental semble en permanence calme et heureux. Et des miracles se produisent autour de vous.
Maharaj : Je ne connais rien en matière de miracles et je me demande si la nature tolère des exceptions à ses lois. A moins d’admettre que tout est miracle. En ce qui concerne mon mental, il n’y a rien de tel. Il y a la conscience dans laquelle tout arrive. Cela est évident et l’expérimenter est à la portée de tous. C’est simplement que vous ne regardez pas assez attentivement. Regardez bien, et voyez ce que je vois.
Q : Que voyez-vous ?
M : Si le centre de votre attention n’était pas mal placé , vous pourriez voir, ici et maintenant, ce que je vois. Vous ne prêtez aucune attention à vous-même. Votre mental s’attache totalement aux choses, aux gens et aux idées et ne porte jamais vers vous. Centrez votre attention sur vous, devenez conscient de votre propre existence. Regardez-vous agir, examinez les motivations et les résultats de vos actions. Etudiez la prison que, par inadvertance, vous avez construite autour de vous. En sachant ce que vous n’êtes pas vous en arriverez à vous connaître. Le retour vers vous-même passe par les refus et les rejets. Une chose est certaine, le réel n’est pas imaginaire, ce n’est pas un produit de la pensée. Même la sensation du « je suis » n’est pas continue, bien qu’elle soit une indication utile ; elle montre où chercher mais pas que chercher. Simplement, étudiez-la bien. Dès l’instant où vous serez profondément convaincu de ne rien pouvoir dire d’autre de vous que « je suis », et que rien qui puisse être désigné soit vous, le besoin du « je suis » sera dépassé et vous ne serez plus appliqué à vous définir avec des mots. Tout ce dont vous avez besoin, c’est de vous débarrasser de la tendance à vous définir. Toutes les définitions ne s’appliquent qu’au corps et à ses expressions. Une fois l’obsession du corps disparue vous retournerez spontanément et sans effort à votre état naturel. La seule différence qu’il y ait entre nous c’est que je suis conscient de mon état naturel alors que vous êtes dans la confusion. De même que l’or des bijoux n’est pas supérieur à la poudre d’or, sauf si l’esprit le décide, de même dans l’être nous sommes un, seule notre apparence est différente. Nous le découvrons en étant sérieux, en cherchant, en enquêtant, en questionnant à longueur de jours et d’heures, en consacrant notre vie à la recherche, à la découverte.
Extrait du CHAPITRE 4 – page 23
Q : Cependant, je ne vois pas comment une chose peut venir à l’existence sans une cause.
M : Quand je dis qu’une chose est sans cause, je veux dire qu’elle peut être sans une cause précise. Votre mère n’était pas nécessaire pour vous donner naissance ; vous auriez pu naître d’une autre femme. Mais vous n’auriez pas pu naître sans la terre et le soleil. Même ceux-ci n’auraient pu causer votre naissance sans le facteur le plus important ; votre propre désir de naître. C’est le désir qui donne la naissance, qui donne le nom et la forme. On imagine et on veut le désirable et il se manifeste comme quelque chose de tangible ou de concevable. C’est ainsi qu’est créé le monde dans lequel nous vivons, notre monde personnel. Le monde réel est hors du champ du mental ; nous le voyons à travers le filet de nos désirs, divisé en plaisir et misère, juste et faux, intérieur et extérieur. Pour vois l’univers tel qu’il est vous devez passer de l’autre côté du filet. Ce n’est pas difficile, le filet est plein de trous.
Q : Que voulez-vous dire par trous ? Et comment les trouver ?
M : Regardez le filet et ses nombreuses contradictions. Vous faites et défaites à chaque pas. Vous désirez la paix, l’amour, le bonheur, et vous travaillez durement à créer la misère, la haine et la guerre. Vous voulez la longévité et vous vous gavez ; vous recherchez l’amitié et vous exploitez. Considérez votre filet comme tissé de telles contradictions et supprimez-les : le simple fait de les voir suffira à les faire s’évanouir.
Q : Puisqu’en voyant la contradiction je la supprime, n’y a-t-il pas de lien causal entre mon regard et la suppression ?
M : La causalité, même comme concept, ne s’applique pas au chaos.
Q : Dans quelle mesure le désir est-il un facteur causal ?
M : C’est un facteur parmi de nombreux autres. Pour chaque chose il y a d’innombrables facteurs. Mais la source de tout ce qui est, c’est l’Infinie Possibilité, la Réalité Suprême qui est en vous et projette sa puissance, sa lumière et son amour sur chaque expérience. Mais cette source n’est pas une cause et nulle cause n’est une source. C’est pourquoi je dis que tout est sans cause. Vous pouvez essayer d’étudier la façon dont une chose se produit, mais vous ne pouvez pas découvrir pourquoi une chose est ce qu’elle est. Une chose est ainsi parce que l’univers est ce qu’il est.
Extrait du CHAPITRE 5 – page 25
Q : Qu’est-ce que la mort ?
M : C’est un changement dans le processus de vie d’un corps déterminé. L’intégration cesse et la désintégration commence.
Q : Mais qu’en est-il du « connaissant ». Disparaît-il avec le corps ?
M : Il disparaît à la mort, de la même façon qu’il est apparu à la naissance.
Q : Et il ne reste rien ?
M : La vie reste. La conscience a besoin d’un véhicule et d’un instrument pour sa manifestation. Quand la vie produit un autre corps, un autre « connaissant » vient à être.
Q : Y a-t-il un lien causal entre les « corps-connaissants » et les corps-mentals successifs ?
M : Oui, il y a quelque chose qu’on pourrait appeler le corps-mémoire, ou corps causal ; un enregistrement de tout ce qui a été pensé, désiré et fait. C’est comme l’agglomération d’un nuage d’images.
Q : Que signifie une existence séparée ?
M : C’est la réflexion, dans un corps séparé, de l’unique réalité. Dans cette réflexion le non-limité et le limité sont confondus et pris pour la même chose. La suppression de cette confusion est le but du yoga.
Q : La mort ne supprime-t-elle pas cette confusion ?
M : Dans la mort, seul le corps meurt. La vie ne meurt pas, ni la conscience, ni la réalité. Même le corps n’est jamais aussi vivant qu’après la mort.
Q : Mais renaît-on ?
M : Ce qui est né doit mourir. Seul le non-né ne meurt pas. Trouvez ce qui jamais ne dort ni jamais ne s’éveille, et dont la pâle réflexion est notre sensation du « je ».
Q : Comment puis-je mener à bien cette investigation ?
M : Comment faites-vous pour trouver une chose ? En fixant sur elle votre mental et votre cœur. Il y faut de l’intérêt et un rappel constant. Se rappeler ce qui doit être remémoré est le secret du succès. Vous y parvenez par le sérieux, par l’application.
Q : Voulez-vous dire que le simple fait de vouloir est suffisant ? Les qualifications et les occasions sont certainement nécessaires.
M : Elles viendront avec l’application. Ce qui, par-dessus tout, importe, c’est d’être libéré des contradictions : le but et le moyen ne doivent pas se situer sur des plans différents ; la vie et la lumière ne doivent pas se combattre ; le comportement ne doit pas trahir la foi. Vous pouvez appeler cela honnêteté, intégrité, plénitude ; il ne faut pas retourner en arrière, défaire, déraciner, abandonner le terrain conquis. De la ténacité dans le dessein et de l’honnêteté dans la recherche vous amèneront au but.
Q : Ténacité et honnêteté sont assurément des dons. Je n’ai trace ni de l’une ni de l’autre.
M : Tout vous viendra en chemin. Faites d’abord le premier pas. Toutes les bénédictions viennent de l’intérieur. Tournez-vous vers l’intérieur. Le « je suis », vous savez. Soyez avec lui à tous les instants dont vous pouvez disposer jusqu’à ce que vous vous tourniez vers lui spontanément. Il n’y a pas de voie plus simple et plus facile.
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